Noirs, mêlés de fils roux, mollement ondés, les cheveux de Juliette, défaits, la couvraient exactement tout entière. Un rideau noir, à mesure que ma mère défaisait les tresses, cachait le dos; les épaules, le visage et la jupe disparaissaient à leur tour, et l'on n'avait plus sous les yeux qu'une étrange tente conique, faite d'une soie sombre à grandes ondes parallèles, fendue un moment sur un visage asiatique, remuée par deux petites mains qui maniaient à tâtons l'étoffe de la tente.
L'abri se repliait en quatre tresses, quatre câbles aussi épais qu'un poignet robuste, brillants comme des couleuvres d'eau. Deux naissaient à la hauteur des tempes, deux autres au-dessus de la nuque, de part et d'autre d'un sillon de peau bleutée. Une sorte de diadème ridicule couronnait ensuite le jeune front, un autre gâteau de tresses chargeait plus bas la nuque humiliée. Les portraits jaunis de Juliette en font foi: il n'y eut jamais de jeune fille plus mal coiffée.