Antoine Chambert-Loir a publié une critique de Alors nous irons trouver la beauté ailleurs par Corinne Morel Darleux
Alors nous irons trouver la beauté ailleurs
4 étoiles
Corinne Morel Darleux nous invite à l'accompagner pendant un séjour d'un mois à Pondichéry où l'ont conduites ses activités d'intellectuelle, de militante, d'observatrice du monde tel qu'il va. Mais du détail de ses activités, ou de celles qui l'avaient mené au Rojava, nous ne saurons en fait que peu de choses, il n'en est souvent question qu'au détour d'une phrase.
En fait, et aussi paradoxal que cela puisse paraître, c'est à l'intimité de son déplacement qu'elle nous convie à assister. Déplacement non seulement en Inde, mais surtout ailleurs, comme le soulignent les « confins » du sous-titre. Un ailleurs qui n'est pas tant géographique que mental. Se déplacer, déplacer son point de vue, s'extraire de ses habitudes invisibles, s'observer en reconstruire d'autres. Elle nous convie à ses lectures (paroxysme de l'intime!); notamment deux romans — Le dieux des petits riens d'Arundhati Roy, et Les yeux dans les arbres, de …
Corinne Morel Darleux nous invite à l'accompagner pendant un séjour d'un mois à Pondichéry où l'ont conduites ses activités d'intellectuelle, de militante, d'observatrice du monde tel qu'il va. Mais du détail de ses activités, ou de celles qui l'avaient mené au Rojava, nous ne saurons en fait que peu de choses, il n'en est souvent question qu'au détour d'une phrase.
En fait, et aussi paradoxal que cela puisse paraître, c'est à l'intimité de son déplacement qu'elle nous convie à assister. Déplacement non seulement en Inde, mais surtout ailleurs, comme le soulignent les « confins » du sous-titre. Un ailleurs qui n'est pas tant géographique que mental. Se déplacer, déplacer son point de vue, s'extraire de ses habitudes invisibles, s'observer en reconstruire d'autres. Elle nous convie à ses lectures (paroxysme de l'intime!); notamment deux romans — Le dieux des petits riens d'Arundhati Roy, et Les yeux dans les arbres, de Barbara Kingsolver — mais aussi ceux qu'elle a écrits, surtout La sauvagière.
Partir, être, puis revenir et confronter cette expérience du déplacement aux enjeux contemporains qui sous-tendent tout le texte, changement climatique, effondrement de la biodiversité, érosion de la démocratie, limites du militantisme… Elle esquisse d'ailleurs quelques pistes en fin de livre.
La lecture de ce livre me rappelle celui que Marielle Macé avait publié en 2018, Nos cabanes, si ce n'est que le ton ici, sans être moins poétique ni moins émouvant, est plus précis (en tout cas que mon souvenir). Les confins où nous irons trouver la beauté sont peut-être dans le monde qui nous entoure, peut-être dans notre imaginaire, celui que nos lectures suscitent. Dans tout le texte, ils sont en tout cas nourris par des animaux, des plantes, une chaleur moite, qui passe d'ailleurs d'insupportable à nécessaire… Ils ont un son, une couleur, une odeur… Ils sont vivants.