Apprenti mathématicien, professeur à l'université Paris Cité
Apprenti musicien (batterie, tablas)
Apprenti lecteur (romans, essais, poésie… en français ou en anglais)
C'est d'abord un roman policier, une enquête dans un lieu voué au silence et à …
Je sais enfin qu'une abbaye glorieuse telle que celle de Murbach, en ces temps si tristes, n'a plus un seul scribe, qu'à Saint-Gall sont restés peu de moines qui sachent écrire, que c'est désormais dans les cités que naissent corporations et guildes composées de séculiers qui travaillent pour les universités, et que seule votre abbaye renouvelle de jour en jour, que dis-je ?, porte à des sommets toujours plus hauts les gloires de votre ordre...
On est en 1327 et ce paragraphe au début du livre me rappelle une discussion de @crideaukikuchi qui expliquait le moment où les moines perdirent le monopole de la copie des livres.
C'est d'abord un roman policier, une enquête dans un lieu voué au silence et à …
Des raisons ni littéraires ni cinématographiques font que je me souviens encore du jour où je suis allé voir le film au cinéma, un froid vendredi de février 1987. J'ai revu le film plusieurs fois à la télévision. Pourtant, je n'avais pas encore lu le livre...
Depuis toujours, Sonia puise son bonheur dans la lecture et la solitude. C'est dans une …
D'Oulitskaïa, j'avais lu l'an dernier Le corps de l'âme, un recueil asez étrange de nouvelles que je qualifierais volontiers d'intimistes, entre chair et âme.
Ce premier roman, Sonietchka était sur ma pile à lire depuis je ne sais quand, c'est le libraire qui, la semaine dernière, m'a rappelé que je lui avais commandé ce livre. La volonté d'éviter les essais m'a conduit à le lire presqu'aussitôt.
Sonia, Sonietchka, est bibliothécaire, du genre qui vit dans les livres. Sa rencontre avec Robert Victorovitch, un peintre plus âgé, va faire infléchir sa vie. C'est l'héroïne de ce court roman, et pourtant, on a l'impression qu'elle en est la lectrice, tant l'action y est réservée aux autres personnages, son mari, leur fille Tania, puis Jasia, une amie de Tania.
On peut en tirer l'impression (qui m'est un peu douloureuse) d'une femme qui est passée à côté de sa propre vie. Ou l'impression …
D'Oulitskaïa, j'avais lu l'an dernier Le corps de l'âme, un recueil asez étrange de nouvelles que je qualifierais volontiers d'intimistes, entre chair et âme.
Ce premier roman, Sonietchka était sur ma pile à lire depuis je ne sais quand, c'est le libraire qui, la semaine dernière, m'a rappelé que je lui avais commandé ce livre. La volonté d'éviter les essais m'a conduit à le lire presqu'aussitôt.
Sonia, Sonietchka, est bibliothécaire, du genre qui vit dans les livres. Sa rencontre avec Robert Victorovitch, un peintre plus âgé, va faire infléchir sa vie. C'est l'héroïne de ce court roman, et pourtant, on a l'impression qu'elle en est la lectrice, tant l'action y est réservée aux autres personnages, son mari, leur fille Tania, puis Jasia, une amie de Tania.
On peut en tirer l'impression (qui m'est un peu douloureuse) d'une femme qui est passée à côté de sa propre vie. Ou l'impression opposée que la vie intérieure, les simples activités d'une vie banale, la contemplation engagée dans ce qui nous entoure, ici sa famille, peut atteindre une densité telle que tout désir est comme superflu.
« Je me rendis compte que la mer elle-même devait être le personnage central de …
C'est une sorte de roman, ou plutôt de trois nouvelles, dont les personnages principaux seraient des animaux, une sanderling, un maquereau et une anguille, et une myriade de personnages secondaires qui n'ont pas besoin d'avoirun nom. Quelques humains même. Évidemment, on n'est pas dans La Fontaine, et si ce beau monde interagit avec des bonheurs variés, parfois douloureux pour l'un ou l'autre, on ne se parle pas trop. Les oiseaux poussent bien quelques cris, mais le bruit qui domine tout au long de ce bijou de livre, c'est celui des vagues et du vent, du frétillement permanent de la vie, et du silence béni de la contemplation de ce qui était bien avant nous et qui, si nous voulons bien cesser de jouer aux cons, sera peut-être bien après nous.
« Je me rendis compte que la mer elle-même devait être le personnage central de …
J'ai acheté ce livre découvert par hasard sur l'étal du libraire, comme on ramasse un morceau de bois flotté en se promenant sur la plage. Parce que j'aime la mer, son bruit, son odeur, son mouvement, et que, pourtant, je ne sais pas la voir.
Traduction d'Elisabeth Beyer et d'Aleksandar Grujicic.
A la fin de la guerre civile espagnole, l’écrivain …
Le narrateur, un homme en crise personnelle, journaliste qui se considère comme un écrivain raté, découvre par hasard l'histoire de Rafael Sánchez Mazas, écrivain et l'un des fondateurs de la phalange (organisation espagnole fasciste dans les années 30) : alors que la guerre civile espagnole était sur le point d'être gagnée par les troupes franquistes, Sánchez Mazas, prisonnier des troupes républicaines devait être exécuté avec d'autres prisonniers. Dans la cohue, il s'échappe, et ne doit sa vie sauve qu'à un soldat républicain qui le voit mais ne le dénonce pas et à quelques « amis de la forêt », déserteurs de l'armée républicaine, qui l'aident à survivre pendant les quelques jours qui suivent.
La découverte de cet épisode romanesque mais véridique conduit le narrateur à vouloir en savoir plus. Cette enquête à la première personne est le sujet du livre dont on ne saura trop bien ce qui fait partie …
Le narrateur, un homme en crise personnelle, journaliste qui se considère comme un écrivain raté, découvre par hasard l'histoire de Rafael Sánchez Mazas, écrivain et l'un des fondateurs de la phalange (organisation espagnole fasciste dans les années 30) : alors que la guerre civile espagnole était sur le point d'être gagnée par les troupes franquistes, Sánchez Mazas, prisonnier des troupes républicaines devait être exécuté avec d'autres prisonniers. Dans la cohue, il s'échappe, et ne doit sa vie sauve qu'à un soldat républicain qui le voit mais ne le dénonce pas et à quelques « amis de la forêt », déserteurs de l'armée républicaine, qui l'aident à survivre pendant les quelques jours qui suivent.
La découverte de cet épisode romanesque mais véridique conduit le narrateur à vouloir en savoir plus. Cette enquête à la première personne est le sujet du livre dont on ne saura trop bien ce qui fait partie du « récit réel » et ce qui relève du roman.
Roman ou récit, ce livre est une enquête très émouvante sur ce qui, à un moment ou un autre de nos vies, nous conduit à la faire bifurquer, que nous décidions d'écrire un livre ou de sauver de la mort un écrivain fasciste.
Traduction d'Elisabeth Beyer et d'Aleksandar Grujicic.
A la fin de la guerre civile espagnole, l’écrivain …
Encore le résultat d'une attitude de marabout-d'ficelle dans la librairie. Je ne sais plus pourquoi j'avais choisi de découvrir Javier Cercas par Terra Alta, mais après ce roman policier et le 2e tome de cette trilogie, j'avais décidé d'attendre la sortie en poche du 3e, et m'étais fait conseiller ce livre, qui s'avère être celui par lequel cet auteur s'était fait connaître.
C'est un récit « vrai », comme peut en écrire, de l'autre côté de l'Atlantique, un Daniel Mendelsohn — juste pas la même forme de fascisme.
Que devient l’œuvre d’un écrivain lorsqu’il est traduit, surtout s’il s’appelle Franz Kafka ? Au …
Drôle de livre, que j'avais acheté avec enthousiasme après en avoir lu la recension par Christian Salmon dans AOC. Belle idée que d'aborder Kafka, mort quasi inconnu, presque sans œuvre, et pourtant le plus grand des écrivains avait prophétisé Max Brod, par le regard de dix de ses traducteurs qui lui ont rétrospectivement donné vie.
Pourtant, chapitre après chapitre, malgré les connaissances de l'autrice, l'érudition dit la 4e de couverture, ne parviennent à me défaire d'une désagréable impression de superficiel. Comme si elle avait su ce qu'elle voulait nous dire, mais que toute cette émotion que je crois sincère n'avait pu se coucher sur la page d'encre.
Je ne dirais pourtant pas que cette lecture aura été inutile, juste qu'elle m'aura donné un peu plus soif encore.
Que devient l’œuvre d’un écrivain lorsqu’il est traduit, surtout s’il s’appelle Franz Kafka ? Au …
Ce n'est qu'après sa mort que les livres de Kafka firent de lui l'écrivain mondial qu'il est aujourd'hui. Ses traducteurs, en particulier les premiers, ont joué un rôle fondamental dans la création et la diffusion du mythe.
Cet essai nous en montre dix facettes et nous plonge à des époques et des régions très diverses, à des enjeux de traduction également très variés.
C'est intéressant, instructif, touchant, mais peut-être pas aussi profond que je l'aurais espéré. (Je n'en suis qu'au premier tiers.)
Aucun de nous ne reviendra est, plus qu'un récit, une suite de moments restitués. Ils …
Un témoignage hallucinant, bouleversant. 180 petites pages, l'hiver et le printemps à Auschwitz, où la haine la plus féroce, inconcevable, à peine dicible, les souffrances impensables et les morts innombrables, ne parviennent pas à éliminer la Vie.
Un témoignage dont, je crois sans exagération, on sort un peu autre.
Aucun de nous ne reviendra est, plus qu'un récit, une suite de moments restitués. Ils …
C'est surprenant comment les récits d'Auschwitz, qui sont tellement remplis de morts, dont de nombreux aspects sont carrément insoutenables, sont malgré tout des récits de vie.
Une minute. Pas une seconde de plus. C’est le temps dont dispose la proie d’un …
Un roman policier d'honnête facture, gouleyant, mais au style un peu trop forcé. On ne peut s'empêcher de sourire, parfois, de frémir aussi, car le mode opératoire de l'assassin est carrément sadique. Et il y a quelques passages plutôt touchants même s'ils sont à la frontière du cliché.
An imaginative, feminist, and brilliantly relevant-to-today retelling of Orwell’s 1984, from the point of view …
Julia est une sorte de récriture du roman de George Orwell, 1984, du point de vue de Julia Worthing, la maîtresse de Winston Smith. Ma lecture de 1984 date d'il y a 40 ans, et ma comparaison ne peut qu'être qu'entre le roman que j'ai entre les mains et mes souvenirs de cette ancienne lecture, souvenirs certainement corrompus par le fait que l'univers de 1984 est régulièrement convoqué comme métaphore.
J'étais enthousiaste de l'idée, un peu moins de sa réalisation. Peut-être ai-je eu du mal avec la langue anglaise (ma lecture des 100 premières pages était poussive), peut-être ai-je aussi du mal à supporter un style un peu banal, comme il est courant dans la littérature contemporaine américaine.
Malgré tout, Sandra Newman nous plonge et nous balade dans un monde terrifiant, fait de faux-semblants, de dissimulations, de trahisons, et où tout cela mène le plus souvent à la torture, …
Julia est une sorte de récriture du roman de George Orwell, 1984, du point de vue de Julia Worthing, la maîtresse de Winston Smith. Ma lecture de 1984 date d'il y a 40 ans, et ma comparaison ne peut qu'être qu'entre le roman que j'ai entre les mains et mes souvenirs de cette ancienne lecture, souvenirs certainement corrompus par le fait que l'univers de 1984 est régulièrement convoqué comme métaphore.
J'étais enthousiaste de l'idée, un peu moins de sa réalisation. Peut-être ai-je eu du mal avec la langue anglaise (ma lecture des 100 premières pages était poussive), peut-être ai-je aussi du mal à supporter un style un peu banal, comme il est courant dans la littérature contemporaine américaine.
Malgré tout, Sandra Newman nous plonge et nous balade dans un monde terrifiant, fait de faux-semblants, de dissimulations, de trahisons, et où tout cela mène le plus souvent à la torture, la misère, la mort.
En 2024, il est plus difficile d'attribuer à la récriture la charge dénonciatrice des totalitarismes qu'avait, en 1949, son modèle. Cela le rend d'ailleurs parfois un peu vain. Je n'y ai pas trouvé, pas décelé, le point de vue féministe que j'attendais (naïveté de ma part ?).
Malgré ces réserves, cette plongée dans une absurdie totalitaire violente aura été éprouvante, épreuve renforcée par la conclusion du livre, ouverte et pour le moins glaçante.