Les mots.

Lire Les Mots de Jean-Paul Sartre a été pour moi une expérience troublante et fascinante à la fois. Ce récit autobiographique, où Sartre raconte son enfance, ne se limite pas à une simple chronique familiale : c’est une exploration de la naissance d’un écrivain, et plus encore, de la découverte précoce du pouvoir des mots.

Sartre décrit son enfance auprès de sa mère et de ses grands-parents, après la mort de son père. Très tôt, les livres prennent une place centrale dans sa vie. J’ai ressenti, en parcourant ces pages, combien la lecture et l’écriture lui offraient un refuge et un terrain d’expérimentation. Mais ce qui m’a marqué le plus, c’est sa lucidité implacable. Sartre ne se peint jamais en enfant idéal : il se montre vaniteux, avide de reconnaissance, presque enivré par le rôle d’écrivain qu’il s’attribue déjà.

En le lisant, j’ai parfois souri de ses descriptions de jeux enfantins autour des livres, mais j’ai aussi senti un malaise devant cette mise à nu sans complaisance. Les mots apparaissent comme une arme à double tranchant : instruments de liberté et de création, mais aussi illusion, fuite et piège de l’ego.

Ce qui m’a touché, c’est le moment où Sartre comprend que l’écriture ne doit pas être seulement un jeu ou une posture, mais une responsabilité. Derrière l’ironie et l’autodérision, j’ai perçu l’appel à une authenticité plus grande.

Les Mots m’a laissé une impression durable : celle d’avoir vu naître, dans les contradictions d’un enfant, la vocation d’un penseur qui allait interroger le sens même de l’existence. Une confession lucide, parfois cruelle, mais d’une sincérité inoubliable.