Ameimse a cité Les enfants d'abord par Christiane Rochefort
De tous les opprimés doués de parole, les enfants sont les plus muets. Les cris et fureurs qui émanent du groupe ne sont pas perçus comme protestation inarticulée, mais comme un fait de nature : les enfants, ça crie. Nul être pourtant ne crie sans raison. "Les enfants" (la seule définition précise et recevable du terme étant celle de la Loi : personne de 0 à 18 ans) ne disposent pas de moyens de s'exprimer. Ils n'y sont pas invités, les décisions qui les concernent étant prises sans leur avis. [...] Entre les adultes qui parlent des enfants comme ils les veulent, et les enfants qui ne peuvent pas parler pour eux-mêmes, la passe est étroite. Et la mystification se porte bien. Il faudrait pourtant sortir de là. Mais être "adulte" après tout n'est qu'un choix, par lequel on s'oublie, et se trahit. Nous sommes tous d'anciens enfants. Tout le monde n'est pas forcé de s'oublier. Et dans la situation dangereuse où le jeu adulte aveugle nous a menés, et veut entraîner les plus jeunes, l'urgence aujourd'hui presse un nombre croissant d'anciens enfants qui n'ont pas perdu la mémoire de basculer côté enfants.
Christiane Rochefort signe avec cet essai aux accents pamphlétaires un écrit incisif, reflet et produit d'une époque - les années 70 - avec sa part d'impensés et d'angles morts, mais aussi avec ses espaces de réflexion ouverts, en renversant des perspectives, servi par un sens de la punchline indéniable. Le texte est à la fois daté, avec des développements et des parallèles parfois très critiquables, et doté de passages qui résonnent toujours, le tout suivant un format assez libre et dispersé.
En résumé, une réflexion à propos de l'adultisme tout droit issue de la France des années 70, signée par une figure militante de cette époque qui a notamment fait partie du MLF.