Agrapha, ce qui n'est pas écrit
5 étoiles
Voilà bien une lecture sur laquelle je peine à mettre des mots, des qualificatifs, qui rendraient justice à l'expérience littéraire fascinante, grisante même, que m'a fait vivre ce roman. Comme l'annonce au fond son titre, Agrapha se vit en tant que livre... peut-être plus qu'il est possible d'écrire à son propos. Et l'intrigue est à découvrir en le lisant. Alors, sans doute, je peux commencer simplement par partager mon enthousiasme : j'ai adoré ce que l'oeuvre a su me faire ressentir en tant que lectrice. Puis, si j'essaie de rassembler quelques idées, je dirais qu'Agrapha est une oeuvre à part de plein de façons différentes. C'est une expérience (pluri)linguistique et narrative. Une source de questionnements constants sur ce qui est lu et sur la manière dont il faut recevoir et comprendre les différents matériaux rassemblés, pour certains, fragments qui ont traversé les siècles. Explorant les frontières du sensible, l'oeuvre teste les limites des cadres conceptuels à partir desquels les lecteurices du XXIe siècle peuvent appréhender et comprendre le monde. C'est aussi une expérience hors ou par-delà les genres, déstabilisant ce qui est censé séparer des catégories contemporaines qui sont renvoyées à leur caractère artificiel : l'historique et le fantastique, le fictif et le réel... En nous plongeant dans le haut Moyen Âge occidental, les thèmes traités qui s'entremêlent sont aussi particulièrement riches et d'actualité : il est question de place des femmes dans la société, de rapports au vivant, d'affranchissement de hiérarchies sociales...
Il y a sans doute autant de lectures d'Agrapha qu'il y a de lecteurices. En ce qui me concerne, je ne suis pas sortie indemne de cette expérience de littérature.