Leito a publié une critique de Glamorama par Bret Easton Ellis
Glamorama
4 étoiles
Un personnage/narrateur profondément antipathique, au cerveau complètement grillé par la jet-set, les drogues et l'alcool. Et d'autant plus antipathique que ses pensées sont un flot infini de name-dropping et de noms de marques de mode dans lequel il est facile de se noyer, d'autant plus quand on n'a pas la moitié des références, même si c'est très efficace pour illustrer cet univers en vase clos, obsédé par son image, où tout le monde se connaît et où il est essentiel de connaître tout le monde. Tout ça pour dire que ce roman commence quand même par une bonne mixture pas facile à avaler (même les dialogues peuvent épuiser tant personne ne s'écoute, tout se répète, chacun semble parler en parallèle des autres). Mais comme je faisais confiance à l'auteur, j'ai pris mon mal en patience, et je me suis autorisé à lire un peu en diagonale quand les paragraphes n'étaient que des suites de noms propres. Il y a des petites récurrences discrètes qui interpellent par rapport au personnage : une sensation de froid (qu'il semble être le seul à sentir, en tout cas personne ne relève quand il l'évoque), la présence de confettis en tout lieux, le fait qu'il ne tombe jamais d'accord avec les gens qui lui rappellent l'avoir vu à tel ou tel endroit… On se pose des questions sur sa santé mentale et on questionne ce qu'il vit (ces course-poursuites, est-ce que ce n'est pas juste de la paranoïa ? ce film qu'il serait en train de tourner, est-ce que ce n'est pas juste une manière de toujours se mettre en scène ?). Mais ces occurrences deviennent de plus en plus évidentes au cours de la deuxième partie, dans un bateau vers l'Europe, et les évènements anormaux se multiplient (sans que notre imbécile de personnage semble connecter les fils, ce qui le met dans des situations désastreuses). Le reportage en immersion dans le monde de la célébrité ultra-matérialiste et décadente glisse lentement vers le thriller psychologique (toutes les personnes rencontrées sur le bateau semblent mentir sur leur identité), puis dans la troisième partie vers le thriller gore et ultra-violent, où les descriptions des horreurs dont on est témoin ont la même précision clinique que les scènes de sexe qui jalonnent le récit. Plus ça va, plus on espère comprendre, mais le mystère s'épaissit, il y a des ramifications dans tous les sens, un complot à l'échelle mondiale, il n'y a plus un mais deux tournages avec chacun leur scénario, la vérité s'efface petit à petit, la réalité peut être modifiée, les identités sont multiples et notre narrateur lui-même ne sait plus qui il est… Pas facile de parler de ce livre tant il est cryptique. L'impression d'un trop-plein, d'être balloté dans tous les sens pour ne jamais recevoir les éclaircissements attendus, mais en même temps c'est aussi ça qui en fait une vraie expérience de lecture. (par contre j'ai pas compris pourquoi les chapitres étaient en ordre décroissant)