L’humanité aborde le prochain siècle sans pitié aucune, avec la même avidité et la même myopie qui lui ont permis autrefois de s’approprier des continents entiers. Le colonialisme s’inscrit désormais dans la temps, et non plus dans l’espace; le pire n’est peut être pas derrière nous, mais devant nous. Nous nous comportons en effet en colonisateurs des générations futures. Nous les privons de leur liberté, de leur santé, peut-être de leur vie — tout comme les colonisateurs l’on fait par le passé. Nous imposons des conséquences de nos actes aux humains qui viendront après nous, et ce avec une brutalité et une indifférence qui donnent le vertige. Nous faisons comme s’ils n’étaient pas là, comme si leur pays était le nôtre, comme si leur monde était vide, comme si nous pouvions puiser à notre guise dans les ressources disponibles — eau potable, sol fertile, air sain — sans penser qu’ils pourront en avoir besoin eux aussi. Nous spolions nos petits-enfants, nous dévalisons nos enfants, nous empoisonnons notre progéniture.
— Nous colonisons l'avenir de David Van Reybrouck (Page 17)