Nicolas Fressengeas a cité Le Double par Naomi Klein
Ce qui est choquant, ce sont moins les histoires elles-mémes que le fait qu'elles ne semblent plus gêner personne. Un quart de siècle après No Logo, il semble admis qu un article de fast fashion porté par des jeunes femmes de New York, de Londres ou de Toronto s'accompagne du risque, pour d'autres jeunes femmes, de mourir dans l'incendie de leur usine de confection à Dhaka, au Bangladesh ; ou que les usines fabriquant nos télephones portables à Shenzhen, en Chine, entourent leurs bâtiments de filets anti-suicide pour se prémunir contre les actes désespérés de leurs ouvriers ; ou que des villes comme Dubaï et Doha soient construites et entretenues par des armées de migrants vivant et travaillant dans des conditions telles de misère et d'asservissement qu'ils peuvent mourir à la tâche sans que leurs employeurs en soient inquiétés ; ou que les travailleurs des entrepôts du New Jersey aient à se battre contre l'un des trois hommes les plus riches de la planète pour avoir le temps d'aller aux toilettes lors de leurs pauses ; ou que les modérateurs de contenu à Manille aient à regarder jour après jour des décapitations et des viols d'enfants pour que les flux de nos médias sociaux soient "propres" ou que notre consommation frénétique et énergivore soit vectrice de feux de forêt dans les banlieues huppées de Los Angeles et de Sonoma, que des détenus payés à peine un dollar par jour combattent au péril de leur vie, tandis que des migrants originaires de nations d'Amérique centrale (victimes elles-mêmes de catastrophes climatiques) respirent des fumées toxiques, contraints de travailler à la récolte des avocats et des fraises, jusqu'à ce qu'ils soient renvoyés chez eux, jetés comme des fruits pourris, parce qu'ils ont eu le malheur de tomber malades ou d'oser réclamer de meilleures conditions de vie et de travail.
— Le Double de Naomi Klein (Page 314 - 315)
Troisième partie, intitulée Terres d'ombre. Extrait d'un passage montrant la difficulté de contrer les délires conspirationnistes du Monde miroir, quand certaines conspirations, aux objectifs triviaux, sont bien réelles.