Nicolas Fressengeas wants to read Arca by Van Jensen
Merci @luc@bw.fiat-tux.fr
Entre catalyseur de savoirs, passeur de compétences et ouvreur scientifique, j'aspire à l'exploration littéraire des futurs possibles, sans totalement exclure l'exploration future de possibles littéraires.
Mes alter egos, dans le Fédivers ou sur le web libre sont là : fressengeas.net
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Merci @luc@bw.fiat-tux.fr
Je suis Administrateur des Données, des Algorithmes et des Codes sources (ADAC) de mon établissement... et ce livre trainait encore dans ma bibliothèque, sans avoir été ouvert.
Mauvaise idée.
Il faut cependant dire que son titre ne me laissait pas penser qu'il serait aussi divertissant qu'un roman. La lecture de l'avant-propos est pourtant de bon augure !
Quelle est la raison qui m'a décidé à me pencher dessus plus sérieusement ? L'augmentation récente et importante des sollicitations au sein de mon établissement en matière de propriété intellectuelle relative aux données issues de la recherche.
Les collègues prennent conscience de leur valeur ! Et c'est plutôt une bonne nouvelle.
Bikepunk, donc. Autant préciser d'emblée que la simple évocation du titre et de la thématique, entre maîtrise du vélo et dépendance technologique, ont immédiatement coché toutes mes cases littéraires et au-delà. Inconditionnel de l'œuvre avant même de l'avoir lue au point de manifester mon intérêt pour ses produits dérivés — t-shirts et polo —, j'en écris maintenant une chronique qui peut être influencée par cet a priori des plus favorables, essentiellement du fait d'une thématique largement au cœur de mes préoccupations majeures, personnelles comme professionnelles.
Et pourtant, Bikepunk m'a surpris. Je connaissais, les écrits de Ploum, du Stagiaire à Printeurs, et me targue immodestement de connaître l'univers littéraire de la science-fiction. Je peux l'écrire, désormais : j'ai beaucoup aimé les œuvres précédentes de Ploum, sans néanmoins pouvoir me départir de l'impression d'une maturation quelque peu inaboutie. Puis, ce fut Bikepunk. Ce roman montre sans conteste possible l'évolution …
Bikepunk, donc. Autant préciser d'emblée que la simple évocation du titre et de la thématique, entre maîtrise du vélo et dépendance technologique, ont immédiatement coché toutes mes cases littéraires et au-delà. Inconditionnel de l'œuvre avant même de l'avoir lue au point de manifester mon intérêt pour ses produits dérivés — t-shirts et polo —, j'en écris maintenant une chronique qui peut être influencée par cet a priori des plus favorables, essentiellement du fait d'une thématique largement au cœur de mes préoccupations majeures, personnelles comme professionnelles.
Et pourtant, Bikepunk m'a surpris. Je connaissais, les écrits de Ploum, du Stagiaire à Printeurs, et me targue immodestement de connaître l'univers littéraire de la science-fiction. Je peux l'écrire, désormais : j'ai beaucoup aimé les œuvres précédentes de Ploum, sans néanmoins pouvoir me départir de l'impression d'une maturation quelque peu inaboutie. Puis, ce fut Bikepunk. Ce roman montre sans conteste possible l'évolution du talent de Ploum vers une œuvre achevée, vers un ouvrage touchant au tout meilleur de la science-fiction telle que je l'apprécie : à la fois thriller divertissant et conte philosophique porteur d'une vérité crue.
Le tout meilleur par son thème. Une préoccupation majeure aujourd'hui, entre dépendances énergétique et technologique, que je découvre pour la première fois exposée par la fiction, à travers les pérégrinations cyclistes de Gaïa et Thy dans un monde post apocalyptique, sous une plume ciselée.
La technologie a causé la perte de l'humanité. Le vélo est une technologie. Les cyclistes sont haïs. Sommée de mettre son utérus à disposition de la communauté lors de sa puberté, Gaïa rejoint le cycliste paria Thy, et tous deux s'enfuient. C'est en traversant ou rejoignant d'autres communautés à travers les ruines d'une civilisation perdue qu'ils trouveront des réponses à des questions qu'ils ne s'étaient pas posées.
Bikepunk est un ouvrage précieux, car il aborde la thématique essentielle de l'envahissement technologique auquel nous sommes aujourd'hui confrontés, avec son cortège d'insidieuses de dépendances et de menaces sur les fondements mêmes de nos démocraties et du climat de notre planète. Et pourtant, contrairement à la plupart des articles et des essais sur le sujet, Bikepunk est joyeux. C'est un roman enlevé, un page turner en bon français, un roman qui ne vous lâche pas. Mais c'est aussi, toujours en bon français, un feel good book, une science-fiction post apocalyptique joyeuse, qui n'est pas sans rappeler La Route, le chef-d'œuvre de Cormac McCarthy, dont Bikepunk prend le contre-pied émotionnel tout en en partageant les paysages. Précieux, donc, pour porter ces thématiques difficiles et essentielles auprès d'un public autrement hors de portée.
Vous avez compris. J'ai adoré Bikepunk. Cela fait bien longtemps que je ne m'étais pas plongé dans un livre de cette qualité. Merci Ploum, et bravo. Merci aussi à Bruno Leyval, illustrateur, et à PVH éditions, pour la qualité de l'objet livre lui-même.
Pour conclure cette critique, dithyrambique, je le crains, il me faut absolument vous donner quelques extraits des chroniques du flash, garanties sans informations susceptibles de perturber le plaisir de la lecture de Bikepunk. La dernière est ma préférée.
Page 12
Mais sans les routes lisses et parfaites nécessaires aux voitures, il n'était pas possible de créer les premiers vélos. Sans les pneumatiques conçus pour absorber les vibrations d'une tonne de métal en mouvement, il n'aurait pas été imaginable d'inventer le VTT. En ce sens, le vélo représente "la voiture nouvelle génération", le descendant direct de l'automobile.
Page 21
Toute technologie vient avec son questionnement : en sommes-nous le maître ou l'esclave ? Est-ce un progrès ou un affaiblissement ?
Page 63
Avec l'avion, le train et la voiture, l'humanité avait inventé la téléportation. Elle ne se déplaçait plus que d'un aéroport à une gare ou à une sortie d'autoroute. Les paysages n'étaient plus que des décors vaguement pittoresques aperçus depuis les abords de stations d'essence toutes identiques.
Le piéton devint une espèce réduite à se déplacer vers ou depuis une place de parking. Marcher un kilomètre entre deux points n'était même plus envisageable tant le territoire entre les routes semblait inconnu, hostile.
Page 201
Un sac sur le dos ou sur la selle, les humains s'aventuraient parfois hors des villes. Pour quelques heures ou quelques jours, les immeubles laissaient la place aux arbres, le chant des oiseaux remplaçait le bruit des voitures. La solitude des paysages se substituait aux conversations incessantes.
Malgré l'épuisement la saleté et la puanteur un énorme sourire traversait le visage de celleux qui rentraient chez iels les muscles douloureux et le corps couvert d'écorchures.
"Rien", répondaient-iels à celleux qui leur demandaient quel équipement moderne connecté leur avait le plus manqué durant l'expédition. À la question "Alors, c'était bien?", la langue se trouvait démunie pour répondre autrement que par un regard lointain.
Un regard qui se portait déjà sur la prochaine aventure.
Page 219
Nous croyions échanger entre humains, mais nous ne faisions qu'envoyer nos correspondances à des algorithmes automatiques qui les agrégeaient pour ensuite produire du contenu idéal, affichant sur nos écrans les messages ayant la plus grande probabilité d'accroître notre consommation.
Incapables de communiquer sans algorithmes interposés, les humains étaient prisonniers, condamnés à l'abrutissement solitaire.
Une minorité s'en rendit compte et décida de lutter. Ses membres tentèrent, pour la millième fois de l'histoire, de réinventer la communication entre humains, de nous avertir.
Personne ne les entendit. Personne ne les remarqua. Leurs messages n'avaient, après tout, qu'une trop faible probabilité d'augmenter notre consommation.
- Vous êtes en train de dire que les gens sont-ils trop bêtes ? avait demandé Basri.
- Pas seulement ça, avait dit Miriam. Je parle de déni. D'égoïsme. De pensée magique. Nous ne sommes pas des êtres rationnels. Notre besoin de consolation nous empêche de regarder froidement la réalité. Nous consommons et nous nous faisons beaux et nous nous convainquons que si nous gardons la tête dans le sable, les monstres s'en iront tout seuls. Pour dire les choses plus simplement, nous refusons de nous sauver nous-mêmes en tant qu'espèce. Nous refusons de faire ce qu'il faut faire. Tous les dangers qui nous menacent sont liés de près ou de loin à ce défaut.
— Upgrade by Blake Crouch (Page 144)
L'Homme, un mammifère comme les autres ?
La famine, la maladie, la guerre, le réchauffement : ces menaces planent sur nous comme des nuages orage en train de se former. Mais quatre-vingt-dix-neuf pour cent de l'humanité constate que notre monde s'effondre en lisant les gros titres du matin, puis décide d'ignorer ce fait pour vIvre sa journée comme si de rien n'était.
— Upgrade by Blake Crouch (Page 143)
Jusqu'ici, tout va bien. Ou peut être pas.
Lecture suggérée par @mediapart@mediapart.social. Mais je vais me laisser tenter par la version française.
#Bookwyrm a gagné : après hésitations, je le mets dans la liste "À lire", qui ne cesse de s'alonger.
Surpris. Ce livre m'a surpris. Non, ce n'est pas une dystopie, enfin pas vraiment. Ce n'est pas non plus réellement de la science-fiction, ou peut-être un peu quand même. Qu'est-ce donc alors ? Où ranger ce livre ? Je ne peux le révéler, sous peine d'amputer le plaisir de la lecture.
Mais quelle écriture enlevée ! Le style perturbe un peu, au départ, car le narrateur est une intelligence artificielle, prénommée Alfie, donc. Une IA orientée domotique, dont la fonction est d'accompagner une famille au quotidien.
Omnisciente, dotée d'ubiquité au sein du domicile, connectée numériquement au reste du monde, le tout au sein d'un écosystème propriétaire commercial qui ferait pâlir Apple et Microsoft.
Elle est là. Elle observe. Elle raconte. Elle apprend à connaître sa famille... et l'humanité.
Et elle manipule.
Un livre difficile à mettre de côté une fois entamé.
Marine Tondelier retrace la montée du FN Steeve Briois vers le pouvoir à Hénin-Beaumont, et les pratiques mises en place par Briois et ses sbires une fois en place.
La force de ce livre, c'est, tout au long du livre, l'absence de jugement moral envers les habitants qui ont fait ces choix. Tondelier dissèque avec une grande objectivité les pratiques militantes mises en place par Briois pour parvenir au pouvoir et surtout y rester. Les explications sont limpides, jamais verbeuses.
C'est un très bien choix de rééditer ce livre en 2024, car le lecteur peut dresser un parallèle entre Hénin-Beaumont en 2014, et la France de la fin de règne de Macron.
Un manque peut-être, Tondelier ne nous livre pas vraiment d'analyse sur ce qui aurait pu (ou pas) être fait par la gauche pour contrer les stratégies du FN, qui sont elles exposées de façon limpide.
Je conseille quand …
Marine Tondelier retrace la montée du FN Steeve Briois vers le pouvoir à Hénin-Beaumont, et les pratiques mises en place par Briois et ses sbires une fois en place.
La force de ce livre, c'est, tout au long du livre, l'absence de jugement moral envers les habitants qui ont fait ces choix. Tondelier dissèque avec une grande objectivité les pratiques militantes mises en place par Briois pour parvenir au pouvoir et surtout y rester. Les explications sont limpides, jamais verbeuses.
C'est un très bien choix de rééditer ce livre en 2024, car le lecteur peut dresser un parallèle entre Hénin-Beaumont en 2014, et la France de la fin de règne de Macron.
Un manque peut-être, Tondelier ne nous livre pas vraiment d'analyse sur ce qui aurait pu (ou pas) être fait par la gauche pour contrer les stratégies du FN, qui sont elles exposées de façon limpide.
Je conseille quand même vivement cette lecture, qui renforcera tout un chacun dans la conviction que laisser cyniquement le RN atteindre le pouvoir pour qu'il s'use et se discrédite (comme un apprenti sorcier haut placé voulait faire) est une très, très mauvaise idée. Marine Le Pen et ses sbires ne sont pas nécessairement des incapables, ilne faut surtout pas les prendre de haut.
Une chouette BD sur une chouette rencontre entre deux « surdoués ». Elle permet d'expliquer le fonctionnement des HPI, ce que c'est scientifiquement, au-delà de la mode et du business. Cela démonte ainsi les nombreux clichés dessus. On pourra regretter deux trois références néfastes. Une référence à la psychanalyse, dont on voit mal, vu les dégâts occasionnés notamment aux familles d'enfants autistes, ce qu'elle pourrait dire de non nuisible sur les HPI. L'autre référence est sur Jeanne Siaud Facchin, «psy», qui a inventé le terme de zèbre mais aussi quelques fadaises sur les surdoués. A ce propos on pourra écouter la série d'émissions, Contes et légendes de l'intelligence, consacrées à la surdouance de Méta de choc.
Le FN est devenu une boule à facettes capable de renvoyer à chacun le rayon de lumière dont il avait besoin pour se sentir rassuré.
— Nouvelles du Front by Marine Tondelier (Page 79)
La bouche pleine de pâtisseries et de pistaches au safran, les femmes parlaient entre elles de leur vagin ; d’abord en gloussant et en rosissant, puis avec naturel. Elles se confiaient, donnaient des détails sur sa taille et sa souplesse, s’apitoyaient sur les dégâts causés par les accouchements successifs. Peu à peu, prenant de l’assurance, elles glissèrent vers les frontières clandestines, dévoilèrent la manière dont il réagissait, ce qu’il préférait, attendait, espérait, mais avec le sérieux de savants échangeant leurs appréciations sur les possibilités d’une matière perfectible. Tant qu’elles parlaient de leur vagin, gardant les maris et leur instrument dans le hors-champ des convenances, elles ne parlaient pas de leur sexualité, vous comprenez. Elles prenaient soin de rester dans la zone grise de l’observation empirique, à des kilomètres de leur mariage, de la moiteur nocturne de leur chambre à coucher, là où elles pouvaient être libres sans risquer rumeurs, colportages et déshonneurs. Maniant à merveille l’art persan de l’hypocrisie, elles veillaient à ce que pas un souffle de ce vent libertaire ne se glisse dans l’oreille conservatrice de leur mari. Qui sait de quoi un homme est capable s’il apprend ce qui se trame dans la tête et le bas-ventre de la population féminine qui habite sous son toit ? Mieux valait les laisser continuer leur vie, comme toujours en parallèle, engoncés dans la certitude confortable de tout maîtriser.
— Désorientale by Négar Djavadi (28%)