Nicolas Fressengeas a répondu au statut de Deu Zeffe
Avertissement sur le contenu Long extrait à propos de Teams et Zoom.
@deuzeffe@oc.todon.fr Merci de l'information ! Un exemple à suivre.
Entre catalyseur de savoirs, passeur de compétences et ouvreur scientifique, j'aspire à l'exploration littéraire des futurs possibles, sans totalement exclure l'exploration future de possibles littéraires.
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Il ne faut pas oublier, juste pour donner un exemple, que l’une des raisons du succès de Zoom tient au fait que l’entreprise a su passer des accords avec des gouvernements totalitaires comme celui de la Chine, pour permettre le contrôle du flux de données. Zoom est ainsi devenue la seule solution possible pour parler avec des citoyen·nes de certains pays qui bloquaient les autres logiciels. Les GAFAM ont offert aux gouvernements les moins démocratiques des systèmes de contrôle très efficaces et aux gouvernements — comme aux institutions — plus libéraux une grande promesse de productivité.
— Éloge du bug de Marcello Vitali-Rosati (Page 38)
Zoom et la Chine. Je découvre.
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Au début du premier confinement en mars 2020, le passage « à distance » s’est installé partout très rapidement. Cela aurait été impensable quelques années auparavant. Les universités, comme les institutions étatiques, ont cherché « la » solution. Zoom et Teams ont été adoptés de façon presque universelle. Les rares institutions qui ont essayé autre chose — en utilisant, par exemple, Jitsi ou BigBlueButton — ont vite abandonné en affirmant que ces logiciels ne fonctionnaient pas assez bien. Zoom et Teams fonctionnaient parfaitement. Or ces outils posent des problèmes qui ont été complètement ignorés. On peut en identifier deux : en premier lieu, le fait qu’ils implémentent une vision du monde particulière et qu’ils ne répondent donc pas à tous les besoins, mais à un besoin spécifique ; en second lieu, qu’ils sont propriétaires et privés et qu’ils ne peuvent donc pas véritablement servir à mettre en place des espaces numériques publics. La première raison devrait désormais être claire : Zoom et Teams ont été conçus en tant qu’outils d’entreprise. Dans le cas de Teams, son intégration à la suite Microsoft Office en atteste : Teams sert à améliorer la productivité des entreprises, en s’intégrant à l’ensemble des activités de chaque salarié·e, en permettant de partager les documents produits avec les autres logiciels de la suite, en rendant les employé·es continuellement disponibles et joignables. Microsoft devient l’espace de travail lui-même : plus besoin d’un bureau, car tout se trouve physiquement sur les serveurs de Microsoft, qui peut ensuite envoyer des rapports de productivité à chaque employé·e ainsi qu’aux dirigeantes. Un rapport à propos de Teams réalisé par le cabinet de conseil Forrester à la demande de Microsoft en 2019 montre clairement ce type de vision du monde : il s’agit de maximiser la productivité, de réduire les temps morts (y compris le temps nécessaire pour passer d’une salle à une autre). Les logiciels proposés par la Silicon Valley ont constitué des solutions pour maintenir la juste distance permettant de maximiser la production les valeurs des GAFAM et celles des États étaient finalement parfaitement alignées. Zoom se situe dans la même lignée ; certes moins intégré dans une suite d’activités de bureau, il propose cependant une forme de rencontre typique de la réunion d’affaires. Il vise à maximiser la productivité en proposant des systèmes pour que les employeurs et les employeuses puissent contrôler leurs employé·es (le « traçage d’attention », par exemple, qui permet de vérifier si une personne détourne les yeux de l’écran) : il permet donc de contrôler l’espace de la réunion en la rendant plus productive. Or, comment de telles visions du monde et des relations interpersonnelles peuvent-elles être compatibles, par exemple, avec la situation d’une soutenance de thèse ? Ou d’un cours ? La question ne semble pas s’être posée. La seconde raison est liée à la première et elle est peut-être encore plus préoccupante. Comme je le soulignais dans l’exemple de la soutenance, l’espace où se produit un événement est très important pour le sens et la valeur mêmes de cet événement. Où ont lieu les événements qui sont hébergés par Teams ou par Zoom ? Sur leurs serveurs. Qui en est donc le garant ? Ces entreprises. Les institutions — notamment les universités, mais aussi les écoles, les gouvernements et une panoplie de structures publiques — ont accepté de déléguer à une entreprise privée la légitimation de leur activité.
— Éloge du bug de Marcello Vitali-Rosati (Page 35 - 36)
Je pensais connaître nombre des raisons qui devraient inciter les universités et les organismes de recherche à utiliser des solutions de vidéo conférence qu'elles et ils maîtrisent. Marcello Vitali-Rosati en apporte encore et, plus important, les organise en un tout cohérent.
Éloge du bug, donc, par un collègue de l'université de Montréal, spécialiste de littérature et culture numérique.
En commençant la lecture, je crains un peu d'être le convaincu que l'on prêche, peut-être comme beaucoup sur le Fédivers. L'introduction laisse néanmoins espérer une approche assez originale, où le numérique est mis en lien avec Kafka, Aladin, Sergio Leone, Socrate et Épicure.
Voyons s'il y a de nouveaux arguments à glaner.
" Ca marche, c'est tout ", nous dit la publicité pour un smartphone. C'est simple, c'est intuitif. Il n'y a …
Impression mitigée donc, mais tout de même un excellent premier roman, je trouve, par l'univers qu'il crée pour ses personnages. L'action se situe à peine à trois décennies de notre présent : Internet a été remplacé par le Réseau, et nous avons --- enfin --- pris conscience des enjeux climatiques.
Le Réseau est une évolution d'Internet dans lequel la notion d'identité de l'utilisateur est devenu une place centrale. Je n'ai pas encore lu le préquel, Le silence selon Manon. J'ai cependant compris cette évolution comme une solution qui a été trouvée à la fois pour permettre de créer un environnement sécurisé sur Internet --- pour y faire des transactions bancaires par exemple ---, mais également pour luter contre les comportements que l'anonymat permet aujourd'hui. Les embryons technologiques permettant la levée de cet anonymat existent aujourd'hui via, par exemple, l'application France Identité.
Cet anonymat est par ailleurs actuellement tout relatif, car …
Impression mitigée donc, mais tout de même un excellent premier roman, je trouve, par l'univers qu'il crée pour ses personnages. L'action se situe à peine à trois décennies de notre présent : Internet a été remplacé par le Réseau, et nous avons --- enfin --- pris conscience des enjeux climatiques.
Le Réseau est une évolution d'Internet dans lequel la notion d'identité de l'utilisateur est devenu une place centrale. Je n'ai pas encore lu le préquel, Le silence selon Manon. J'ai cependant compris cette évolution comme une solution qui a été trouvée à la fois pour permettre de créer un environnement sécurisé sur Internet --- pour y faire des transactions bancaires par exemple ---, mais également pour luter contre les comportements que l'anonymat permet aujourd'hui. Les embryons technologiques permettant la levée de cet anonymat existent aujourd'hui via, par exemple, l'application France Identité.
Cet anonymat est par ailleurs actuellement tout relatif, car il requiert des compétences techniques certaines pour être assuré. La question se pose d'ailleurs de savoir si un réel anonymat sur Internet vis-à-vis des forces de l'ordre est encore possible en 2024. En 2050, le Réseau a résolu cette incertitude en promouvant une ouverture et une transparence totale à tous de toutes nos actions en ligne, mouvements bancaires compris. Toute cette transparence est résumée pour chacun dans son "métadicateur", une note sur 4 (je crois), attribuée à chaque être humain, à laquelle tout un chacun a accès, pour choisir de l'utiliser ou non. Cela n'est pas sans me rappeler un épisode de la délicieuse Black Mirror, voire, en moins délicieux, ce qui se passe aujourd'hui au sein d'un grand pays oriental.
Cette transparence est présentée dans le roman comme ayant eu un très fort impact sur tous nos comportements collectifs, atténuant très fortement la violence de nos sociétés, tout en permettant une prise de conscience sans précédent des enjeux climatiques. C'est ainsi que la notion même d'attentat a disparue, comme la possession d'une voiture personnelle. Citons également la libération, et, semble-t-il, la résolution quasi-totale de la question du genre.
Le lien entre transparence absolue et surveillance absolue éventuelle est abordée. La question d'une évolution possible du Réseau en un organe de contrôle au service d'un pouvoir dictatorial est évoquée, un peu discrètement à mon goût. En effet, autant la transparence a des effets bénéfiques --- et certains processus aujourd'hui gagneraient à être plus transparents ---, autant une transparence trop poussée peut emmener vers la surveillance et devenir un outil précieux pour des velléités fascistes. Voilà certes un aspect difficile de la question, qui m'aurait paru néanmoins central.
Finissons sur l'intrigue, point faible à mon sens. Pour résumer, je me suis demandé tout au long du roman à quel moment la création des décors allait s'achever pour embrayer vers son objet précis. L'avant-scène de l'ouvrage est prise par deux actrices, ou acteurs tant l'incertitude du genre est grande. Une organisation plus ou moins secrète joue également un rôle important. Appelée les Obscuranets, elle est la force d'opposition à l'omniprésence du Réseau. Je ne saurais cependant pas résumer le cœur de l'intrigue, que seul le dénouement sur les dernières pages m'a permis de saisir un peu. Trop d'événements à mon goût ont lieu sans réel lien avec l'intrigue générale. Un exemple significatif : un attentat perpétré par les Obscuranets. Ce dernier a attiré mon attention, car j'en avais lu une mention dans une présentation du livre. C'est un événement qui semble important, surtout du fait que les attentats ont quasiment disparu de par le fait du Réseau. Pourtant, il reste assez peu exploité au sein de l'intrigue.
Il ne faudrait cependant pas que cette faiblesse relative du récit empêche la lecture de cet ouvrage. L'univers qu'il crée est digne d'intérêt à lui seul. Rappelons aussi que c'est un premier roman, qui augure donc du mieux pour les suivants. Le préquel, Le silence selon Manon, est d'ailleurs déjà publié.
Bonne lecture !
Impression mitigée sur ce premier roman. L'univers inventé par Benjamin Fogel est un trésor d'intelligence : c'est une extrapolation passionnante de la techno-société dans laquelle nous vivons aujourd'hui, mêlée avec justesse à l'un des futurs possibles liés aux enjeux climatiques. Pour autant, je suis un peu resté sur ma faim. C'est la difficulté du roman, à mon sens : comment, au sein d'un univers imaginaire (ou non), tisser une histoire qui crée le plaisir de la lecture. Un peu court, cette fois, je le crains. J'ai cependant beaucoup apprécié le dénouement totalement inattendu, en tous les cas pour moi, qui donne envie que le livre ne s'arrête pas en si bon chemin.
J'en profite, avec une autre question : j'ai fait une erreur dans un statut BookWyrm (ici : bw.heraut.eu/user/fresseng/quotation/15271 ). J'ai inversé les champs citation et commentaire. Je m'en suis aperçu juste après la publication et j'ai tout de suite modifié. Cela marche parfaitement sur l'instance BookWyrm, mais cela ne semble pas se propager sur le Fédivers. Je suis ce compte depuis mon compte Mastodon (fediscience.org/@fresseng), et je ne vois jamais la modification. Sais-tu si c'est un bug ? S'il est connu ?
Encore merci ! J'en suis encore à découvrir les avantages et inconvénients de la fédération… et je vais bien me garder de critiquer l'instance qui m'héberge gracieusement ;).
Plus sérieusement, je découvre cette possibilité de choix de fédérer ou de ne pas fédérer avec les autres acteurs de Fédivers, et cela me semble effectivement complètement pertinent, notamment pour les raisons que tu soulignes.
Merci de l'explication ! Je faisais instinctivement le parallèle avec mon expérience entre Pixelfed et Mastodon où l'on peut voir les messages et booster entre les deux types d'instances indifféremment. Toutefois, la typologie des messages sur BookWyrm n'incite cependant pas à ce niveau de fédération.
@ptl@tooting.ch J'ai bien essayé... il ne trouve rien. Même en allant sur ton profil depuis BW, je ne vois pas le message en question. Il y a des trous dans la fédération.
Vous trouvez que j’en fais trop ? Moi aussi, parfois. Car leurs pratiques ont le don de nous faire des nœuds au cerveau. La force du Front national, c’est de parvenir à instiller le doute au plus profond de chacun de nous : après tout, les gens sont contents, après tout, Hénin-Beaumont n’est pas la seule ville où l’opposition est maltraitée en France et les autres ne sont pas forcément dirigées par un maire FN, après tout, des tas de gens continuent à vivre normalement dans cette ville, peut- être que, en réalité, ce sont les élus de l’opposition qui n’ont pas digéré la défaite… Peut-être un peu. Ou peut-être pas. Et peut-être que quand on aura la réponse, il sera trop tard. J’ai l’impression qu’ici le piège s’est déjà refermé. Grâce à une grande intelligence stratégique. Qui fait qu’une très large majorité de la population n’a objectivement aucune raison de s’en plaindre. Et qu’il sera très difficile d’en sortir.
— Nouvelles du Front de Marine Tondelier (Page 207)
Un extrait de la conclusion, qui permet d'accéder à la tonalité de l'ouvrage et qui, j'espère, montre son importance bien au-delà d'Hénin-Beaumont.
Tard valant mieux que jamais, essayons-nous à une critique de ce précieux ouvrage de Marine Tondelier, ouvrage qui éclaire les positions actuelles et récemment passées des uns et des autres, comme de l'autrice.
Essai de critique, malgré la découverte d'une critique déjà existante (post-tenebras-lire.net/nouvelles-front-marine-tondelier/), diffusée via un message de @ptl@tooting.ch (tooting.ch/@ptl/112775036061983418) que je n'ai pas réussi à booster ici, signe probable de l'existence d'une marge de progression dans l'insertion de BookWyrm dans le Fédivers.
Les éditions les Liens qui Libèrent ont justement libéré cet ouvrage à l'occasion des dernières élections législatives qui ont vu prendre corps la perspective d'un gouvernement mené par le Rassemblement National. Je les en remercie grandement, car c'est à cette occasion que j'ai pu à la fois le découvrir et le lire sans plus attendre. Petit regret (mais c'est se montrer gourmand), le format libéré est le PDF destiné à l'impression, au …
Tard valant mieux que jamais, essayons-nous à une critique de ce précieux ouvrage de Marine Tondelier, ouvrage qui éclaire les positions actuelles et récemment passées des uns et des autres, comme de l'autrice.
Essai de critique, malgré la découverte d'une critique déjà existante (post-tenebras-lire.net/nouvelles-front-marine-tondelier/), diffusée via un message de @ptl@tooting.ch (tooting.ch/@ptl/112775036061983418) que je n'ai pas réussi à booster ici, signe probable de l'existence d'une marge de progression dans l'insertion de BookWyrm dans le Fédivers.
Les éditions les Liens qui Libèrent ont justement libéré cet ouvrage à l'occasion des dernières élections législatives qui ont vu prendre corps la perspective d'un gouvernement mené par le Rassemblement National. Je les en remercie grandement, car c'est à cette occasion que j'ai pu à la fois le découvrir et le lire sans plus attendre. Petit regret (mais c'est se montrer gourmand), le format libéré est le PDF destiné à l'impression, au lieu du plus pratique epub. Mais ne boudons pas cette action salutaire des éditions LLL !
Il s'agit d'un ouvrage documentaire publié en 2017. L'autrice, Marine Tondelier, est élue de l'opposition à Hénin-Beaumont lors de l'arrivée au pouvoir du Front National à la mairie de la ville en 2014.
Dans un premier temps, c'est à travers l'histoire industrielle, culturelle et politique de la ville et de ses environs, qu'elle analyse les mécanismes sociaux qui ont conduit à l'accession de Steeve Briois à la mairie d'Hénin-Beaumont. Le lecteur découvre ainsi une combinaison de mécanismes locaux, certains hérités d'une histoire industrielle spécifiques de cette région du nord de la France, et d'autres spécifiques aux combinaisons politiques locales. Néanmoins, l'on découvre comment ces réalités régionales ont été tissées au sein d'une stratégie nationale combinant les différentes municipalités qui ont franchi le Rubicon, au service d'une accession à un plus large pouvoir.
L'autrice nous révèle ensuite par le menu le fonctionnement de la mairie, et notamment de sa gestion des ressources humaines après 2014. Sans colorer du rose de l'amnistie tout le fonctionnement antérieur à 2014, elle révèle les mécanismes par lesquels l'administration arrivée au pouvoir entend bien y rester. Cette partie-là est des plus percutantes et instructive si l'on veut l'extrapoler au niveau national. Elle montre en effet précisément comment "essayer" le Front National par les urnes pourrait ne pas permettre de retour arrière.
Tissée au sein de ces descriptions peut se comprendre la vie d'une élue d'opposition à Hénin-Beaumont. Citons un passage de la conclusion, qui résume assez bien la teneur de l'ouvrage sur cet aspect : "Vous trouvez que j’en fais trop ? Moi aussi, parfois. Car leurs pratiques ont le don de nous faire des nœuds au cerveau. La force du Front national, c’est de parvenir à instiller le doute au plus profond de chacun de nous : après tout, les gens sont contents, après tout, Hénin-Beaumont n’est pas la seule ville où l’opposition est maltraitée en France et les autres ne sont pas forcément dirigées par un maire FN, après tout, des tas de gens continuent à vivre normalement dans cette ville, peut- être que, en réalité, ce sont les élus de l’opposition qui n’ont pas digéré la défaite… Peut-être un peu. Ou peut-être pas. Et peut-être que quand on aura la réponse, il sera trop tard. J’ai l’impression qu’ici le piège s’est déjà refermé. Grâce à une grande intelligence stratégique. Qui fait qu’une très large majorité de la population n’a objectivement aucune raison de s’en plaindre. Et qu’il sera très difficile d’en sortir."
À tous ceux qui pensent "essayer", ou à ceux qui pensent que ce parti se "décrédibilisera" par l'exercice du pouvoir, je recommande cette lecture. Et aux autres aussi.
Vous trouvez que j’en fais trop ? Moi aussi, parfois. Car leurs pratiques ont le don de nous faire des nœuds au cerveau. La force du Front national, c’est de parvenir à instiller le doute au plus profond de chacun de nous : après tout, les gens sont contents, après tout, Hénin-Beaumont n’est pas la seule ville où l’opposition est maltraitée en France et les autres ne sont pas forcément dirigées par un maire FN, après tout, des tas de gens continuent à vivre normalement dans cette ville, peut- être que, en réalité, ce sont les élus de l’opposition qui n’ont pas digéré la défaite… Peut-être un peu. Ou peut-être pas. Et peut-être que quand on aura la réponse, il sera trop tard. J’ai l’impression qu’ici le piège s’est déjà refermé. Grâce à une grande intelligence stratégique. Qui fait qu’une très large majorité de la population n’a objectivement aucune raison de s’en plaindre. Et qu’il sera très difficile d’en sortir.
— Nouvelles du Front de Marine Tondelier (Page 207)
Un extrait de la conclusion, qui permet d'accéder à la tonalité de l'ouvrage et qui, j'espère, montre son importance bien au-delà d'Hénin-Beaumont.
Un extrait de la conclusion « Socrate raconte que, jadis, les cigales étaient des êtres humains, tellement amoureux des arts des Muses qu'ils passaient leur vie à chanter et oubliaient de manger ou de boire jusqu'à en mourir. Pour cela, ils furent récompensés et transformés en cigales, afin qu'ils puissent continuer à dédier leur vie aux arts des Muses sans devoir se préoccuper de rien d'autre. Les cigales de Socrate passent leur vie dans la skholé, l'oisiveté dont nous avons parlé. Elles ne travaillent pas et c'est ce qui les rend divines. Socrate raconte ce mythe pour démontrer que Phèdre et lui ne doivent pas s'endormir bercés par le chant des cigales. Ce serait indigne de ces divins insectes : il faut faire comme eux, se consacrer à la skholé et continuer à discuter. Cela pourrait sembler contradictoire : les cigales sont oisives, ne faudrait-il pas que Socrate et Phèdre …
Un extrait de la conclusion « Socrate raconte que, jadis, les cigales étaient des êtres humains, tellement amoureux des arts des Muses qu'ils passaient leur vie à chanter et oubliaient de manger ou de boire jusqu'à en mourir. Pour cela, ils furent récompensés et transformés en cigales, afin qu'ils puissent continuer à dédier leur vie aux arts des Muses sans devoir se préoccuper de rien d'autre. Les cigales de Socrate passent leur vie dans la skholé, l'oisiveté dont nous avons parlé. Elles ne travaillent pas et c'est ce qui les rend divines. Socrate raconte ce mythe pour démontrer que Phèdre et lui ne doivent pas s'endormir bercés par le chant des cigales. Ce serait indigne de ces divins insectes : il faut faire comme eux, se consacrer à la skholé et continuer à discuter. Cela pourrait sembler contradictoire : les cigales sont oisives, ne faudrait-il pas que Socrate et Phèdre le soient aussi pour les honorer ? Oui, en effet, mais la skholé n'est pas un repos passif, elle est une oisiveté active, une oisiveté engagée. Les cigales ne sont pas flemmardes, inactives ou fatiguées, elles se dédient activement à l'oisiveté qui consiste à chanter, à perdre du temps certes, mais en le remplissant avec les arts des Muses. Si Socrate et Phèdre s'endormaient à l'ombre, cela signifierait qu'ils sont fatigués, mais ne sont fatigués que ceux qui ont travaillé, qui sont du côté de l'ascholia, de l'occupation, des affaires : il est au contraire nécessaire de se situer du côté de la skholé et de se dédier activement à la perte de temps. »
Par ce raccourci, un peu facile, grâce aux cigales, avec cette lecture, je m’arrête sur mes pratiques personnelles du numérique. Et mes non-choix.