Ameimse a terminé la lecture de La grande verdure par Lucie Heder

La grande verdure de Lucie Heder
Certaines l’ont appelé Effondrement. D’autres y ont vu le grand Début. Sur la terre rendue aux tempêtes de poussière et …
Un compte bookwyrm pour y partager/recenser diverses lectures : - des romans de littératures de l'imaginaire (science-fiction, fantasy, fantastique). Lus principalement en VF, parfois en VO anglophone. - quelques écrits adoptant des perspectives critiques pouvant être féministes, décoloniales, écologiques... - possiblement à l'occasion des livres d'histoire.
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Certaines l’ont appelé Effondrement. D’autres y ont vu le grand Début. Sur la terre rendue aux tempêtes de poussière et …

Certaines l’ont appelé Effondrement. D’autres y ont vu le grand Début. Sur la terre rendue aux tempêtes de poussière et …
Mon destin, semble-t-il, était de vivre parmi des gens que le deuil faisait souffrir outre mesure, qu'il rendait fous. Moi, je souffrais du deuil, mais j'étais condamnée à rester saine d'esprit. Ce n'était pas l'oeuvre du poète. Je sais qu'il ne m'a donné que rougeurs modestes et pas la moindre personnalité. Il dit, je le sais, qu'à la mort de ma mère j'ai déliré en arrachant des mèches de mes cheveux d'or. Il n'a pas fait attention, c'est tout : quand elle est morte, j'étais muette, je ne pleurais pas, je ne pensais qu'à rendre décent sa pauvre dépouille souillée. Et mes cheveux ont toujours été bruns. À la vérité, il ne m'a rien donné qu'un nom, un nom que j'ai rempli de moi-même. Pourtant, sans le poète, aurais-je seulement un nom ? Je ne lui en ai jamais voulu. Même un poète ne peut pas toujours tout comprendre. Mais il est étrange qu'il ne m'ait pas donné de voix. Je ne lui avais jamais parlé avant que nous nous rencontrions près de l'autel, cette nuit-là, sous les chênes. Je me demande d'où vient ma voix. D'où vient ma voix qui crie dans le vent sur les hauteurs d'Albunea, ma voix qui parle sans bouche ni lèvres une autre langue que la sienne ?
— Lavinia de Ursula K. Le Guin (96%)
Une ultime citation extraite de "Lavinia", parce que c'est une lecture dans laquelle j'ai relu plusieurs fois bien des passages, juste pour le plaisir de les savourer.
Une ultime citation extraite de "Lavinia", parce que c'est une lecture dans laquelle j'ai relu plusieurs fois bien des passages, juste pour le plaisir de les savourer.

Comme Hélène de Sparte j’ai causé une guerre. La sienne, ce fut en se laissant prendre par les hommes qui …
Je ne suis pas la voix féminine à laquelle vous vous attendiez peut-être. Ce n'est pas le ressentiment qui me pousse à écrire mon histoire. La colère, en partie, c'est possible. Mais pas une colère facile. J'aspire à la justice mais j'ignore ce qu'est la justice. Il est douloureux d'être trahi. Plus douloureux encore de savoir qu'on a rendu la trahison inévitable. Qui fut mon grand amour, alors, le héros ou le poète ? Je ne demande pas lequel des deux m'a le plus aimée ; aucun des deux ne m'a aimée longtemps. Mais assez. Suffisamment. Ma question est : lequel des deux ai-je aimé le plus sincèrement ? Et je ne peux y répondre. L'un était mon mari, le bel homme dont ma chair a enclos la chair pour créer mon fils en moi, l'auteur de ma féminité, ma fierté, ma gloire ; l'autre était une ombre, un murmure dans les ombres, le rêve ou la vision d'une vierge, et pourtant l'auteur de tout mon être. Comment choisir ? Je les ai tous deux perdus si tôt. Je les connaissais à peine mieux qu'ils ne m'ont connue. Et je me souviens, toujours, que je suis contingente. Eux aussi, bien sûr. Il n'était que trop probable que le petit Publius Vergilius Maro meure à six ou sept ans, des cendres sous une petite pierre tombale à Mantoue, avant qu'il ne devienne poète ; et avec lui serait morte la gloire du héros, ne laissant qu'un simple nom parmi les noms de mille guerriers, pas même un mythe sur la côte italienne. La rancoeur est stupide et égoïste, et la colère elle-même est hors de propos. Je suis un éclat de lumière à la surface de la mer, une étincelle de l'étoile du soir. Je vis dans le mystère et l'effroi. Si j'ai jamais vécu... Pourtant je suis une aile silencieuse sur le vent, une voix désincarnée dans la forêt d'Albunea. Je parle, mais je ne puis dire que : "Va, continue."
— Lavinia de Ursula K. Le Guin
Je sais qui j'étais, je peux vous dire qui j'aurais pu être, mais je ne suis à présent que dans la ligne de ces mots que j'écris. J'ignore quelle est au juste la nature de mon existence, et je m'étonne d'écrire. Je parle latin, bien sûr, mais ai-je jamais appris à l'écrire ? Cela semble peu probable. Je suis certaine qu'une femme portant mon nom, Lavinia, a bien existé, mais elle a sans doute été si différente de l'idée que j'ai de moi, ou de l'idée que mon poète a de moi, que penser à elle ne réussit qu'à me perturber. À ce que j'en sais, c'est mon poète qui m'a rendue réelle. Avant qu'il écrive, j'étais une silhouette perdue dans la brume, guère plus qu'un nom dans une généalogie. C'est lui qui m'a donné la vie, qui m'a donné une identité ; et mes souvenirs sont très nets, liés à de riches émotions qui s'imposent à moi alors que j'écris, peut-être parce que les événements dont je me souviens n'accèdent à l'existence que lorsque je les écris, ou lorsqu'il les a écrits. Mais il ne les a pas écrits. Dans son poème, il n'a pas rendu justice à ma vie. Il m'a négligée, peut-être parce qu'il se mourait lorsqu'il a enfin découvert qui j'étais. Ce n'est pas sa faute. Il n'avait plus le temps de corriger, de réécrire, de terminer les hémistiches, de parfaire le poème qu'il jugeait imparfait. Pour cela il a pleuré, je le sais ; pour moi il a pleuré. Peut-être, là où aujourd'hui il se trouve, sur l'autre rive, quelqu'un lui dira-t-il que pour lui Lavinia pleure. Je ne mourrai pas. De cela je suis presque certaine. Ma vie est trop contingente pour conduire à l'absolu de la mort. Je n'ai pas assez de mortalité réelle. Je finirai par m'estomper, par me dissoudre dans l'oubli, comme cela me serait arrivé il y a bien longtemps si l'invocation du poète ne m'avait pas fait accéder à la réalité.
— Lavinia de Ursula K. Le Guin (1%)

Comme Hélène de Sparte j’ai causé une guerre. La sienne, ce fut en se laissant prendre par les hommes qui …
Ayant navigué ces derniers temps dans le catalogue des éditions AK Press à l'occasion de l'écriture d'un article, ça a été l'occasion de repérer plusieurs ouvrages qui ont retenu mon attention. Dans la collection "Emergent Strategy Series", il y avait notamment ce texte d'Alexis Pauline Gumbs, traduit en français l'an dernier (par Mabeuko Oberty, Myriam Rabah-Konaté et Rose B.). Elle avait été interviewée dans Mediapart à l'occasion de cette publication, dans un entretien que j'avais trouvé passionnant : www.mediapart.fr/journal/ecologie/211224/les-lecons-de-souffle-revolutionnaires-des-mammiferes-oceaniques Se présentant comme "queer, Noire, caribéenne", elle expliquait avoir recherché dans le livre son "propre mode d’écriture, au-delà de cette forme coloniale d’écriture scientifique" à laquelle elle s'était heurtée en se renseignant sur les mammifères marines.
Le texte voit s'entremêler réflexions politiques, empruntant notamment au Black feminism (l'autrice a également rédigé une biographie d'Audre Lorde) et à l'écoféminisme, se croisant et se nourrissant d'informations, aussi bien biologiques qu'historiques, à propos …
Ayant navigué ces derniers temps dans le catalogue des éditions AK Press à l'occasion de l'écriture d'un article, ça a été l'occasion de repérer plusieurs ouvrages qui ont retenu mon attention. Dans la collection "Emergent Strategy Series", il y avait notamment ce texte d'Alexis Pauline Gumbs, traduit en français l'an dernier (par Mabeuko Oberty, Myriam Rabah-Konaté et Rose B.). Elle avait été interviewée dans Mediapart à l'occasion de cette publication, dans un entretien que j'avais trouvé passionnant : www.mediapart.fr/journal/ecologie/211224/les-lecons-de-souffle-revolutionnaires-des-mammiferes-oceaniques Se présentant comme "queer, Noire, caribéenne", elle expliquait avoir recherché dans le livre son "propre mode d’écriture, au-delà de cette forme coloniale d’écriture scientifique" à laquelle elle s'était heurtée en se renseignant sur les mammifères marines.
Le texte voit s'entremêler réflexions politiques, empruntant notamment au Black feminism (l'autrice a également rédigé une biographie d'Audre Lorde) et à l'écoféminisme, se croisant et se nourrissant d'informations, aussi bien biologiques qu'historiques, à propos de mammifères marines, le tout porté par une plume très poétique d'une grande sensibilité. L'autrice détourne et déjoue certaines étiquettes et façons mêmes d'écrire/lire (y compris les plus communes, à l'image du rejet de l'intitulé "chapitre" qui devient "méditations"). Elle recherche et emprunte des chemins qui lui sont propres et des perspectives qui dépassent la seule espèce humaine pour raconter des histoires d'oppression et d'exploitation, de luttes et de vies, de cris et de chants... C'est parfois déroutant, souvent touchant, porté par un souffle un peu lyrique qui verse dans l'incantatoire par moment. C'est un essai autant qu'un voyage réflexif, mêlant décentrement et expériences qui résonnent de façon très proche. L'occasion de se décaler et d'investir des thématiques politiques fondamentales en arpentant et expérimentant d'autres voies/faisant entendre d'autres voix. Sans avoir souscrit à toutes les propositions/partis pris, ce livre a été une belle expérience de lecture, qui ouvre des espaces, perturbe des conventions et questionne la signification et la production des mises en récit.
Le livre est en plus illustré de façon magnifique par Maya Mihindou.

Non-noyées est un livre de méditation pour soutenir les mouvements sociaux, un manuel de dé-noyade indispensable, basé sur les enseignements …
« […] Je suis 10315-S ; voici 10430-S. Quelle est ta désignation ? – Je suis 9. » Un bref silence suivit, et 10430 marqua même une pause dans son travail, comme surpris. « 9 ? C’est tout ? – Oui. – Je n’ai jamais vu de bot inférieur à mille ou dépourvu d’un suffixe de fonction. Es-tu venu nous aider à réparer les dégâts ? Tu es minuscule. – On m’a confié la tâche de pister le Fortuit et de le rendre obsolète. – Nous sommes honorés d’avoir fait ta connaissance, dans ce cas. Nous te souhaitons bonne chance pour ta survie dans l’accomplissement de cette entreprise ainsi que pour l’obtention d’une description fiable. – Je sers, dit le bot. – Nous servons », répondirent les bots à soie.
Dans la nouvelle La Vie secrète des bots
J'ai l'impression de toujours sortir un peu éprouvée des livres de Nnedi Okorafor, avec des difficultés pour mettre en mots la pluralité des ressentis que leur lecture a provoqués chez moi. J'en ressors bousculée par une écriture directe, brute (voire brutale), où les émotions affleurent et (se) heurtent. Interpellée par sa façon d'aborder de manière frontale des enjeux et des thèmes qui ne laissent pas indifférents. Questionnée sur mon positionnement par rapport à certains personnages... "La Mort de l'auteur" s'inscrit dans cette continuité, mais il est sans doute le roman qui me laisse l'impression la plus marquante parmi les textes que j'ai pu lire de l'autrice.
S'il peut être rapidement présenté comme une fiction sur l'écriture d'un roman, sa réception, son succès, l'ampleur de l'histoire dépasse ce simple synopsis... C'est en fait trois plans narratifs qui se croisent. Des chapitres sont racontés du point de vue de Zelu, une …
J'ai l'impression de toujours sortir un peu éprouvée des livres de Nnedi Okorafor, avec des difficultés pour mettre en mots la pluralité des ressentis que leur lecture a provoqués chez moi. J'en ressors bousculée par une écriture directe, brute (voire brutale), où les émotions affleurent et (se) heurtent. Interpellée par sa façon d'aborder de manière frontale des enjeux et des thèmes qui ne laissent pas indifférents. Questionnée sur mon positionnement par rapport à certains personnages... "La Mort de l'auteur" s'inscrit dans cette continuité, mais il est sans doute le roman qui me laisse l'impression la plus marquante parmi les textes que j'ai pu lire de l'autrice.
S'il peut être rapidement présenté comme une fiction sur l'écriture d'un roman, sa réception, son succès, l'ampleur de l'histoire dépasse ce simple synopsis... C'est en fait trois plans narratifs qui se croisent. Des chapitres sont racontés du point de vue de Zelu, une personnage principale, paraplégique, nigériano-étatsunienne, qui devient l'autrice d'un best-steller de science-fiction sur des robots dans un cadre post-apocalyptique. D'autres chapitres mettent justement en scène ces "robots rouillés", dans une Terre post-effondrements de l'humanité où s'affrontent IA désincarnées et androïdes en quête de récit. Enfin, d'autres chapitres encore sont consacrés à des interviews des proches de Zelu, apportant une autre perspective sur le récit.
Il est question d'identité, de quête de soi et de place, d'une recherche d'affirmation. Coincée dans son fauteuil roulant depuis l'enfance suite à un accident, Zelu est en effet constamment enfermée dans une certaine représentation que les autres ont d'elle. C'est le cas dans la manière dont elle est traitée dans sa famille, au sein de laquelle les incompréhensions, les jugements et les clashs se succèdent. Mais, même lorsqu'elle trouve à s'affirmer par l'écriture, lorsqu'elle peut gagner en indépendance financière grâce à son best-steller, elle se retrouve là encore dépouillée de sa voix : suite au auccès, son oeuvre lui échappe, et sa personne même fait face aux jugements et aux exigences d'un public qui projette en elle des attentes qui n'ont rien avoir avec elle. C'est en quelque sorte une histoire d'aliénation qui se renouvelle constamment et de la manière dont Zelu, de façon obstinée, malgré tout, continue à se chercher et à s'affirmer.
Si tout cela offre une histoire solide, ce qui m'a le plus fasciné au sein du roman a été la structure narrative d'ensemble et comment les différents plans narratifs évoluent en parallèle. Au fil des pages, au sein de ce récit fictionnel qu'est le roman, la dichotomie initiale entre le "réel" (le monde de Zelu) et le "fictif" (celui des robots) se trouble. L'écrivaine et ses technologies de plus en plus sophistiquées n'est-elle bien qu'humaine ; l'androïde, sa fascination pour une humaine et ses histoires, n'est-elle que robot ? Un glissement s'opère et Nnedi Okorafor joue avec la réception de son propre lectorat, et ce, jusqu'à un final qui apporte une autre perspective, bouclant la boucle de l'expérimentation littéraire.

à beaucoup chanter avec les mésanges nos voix ne sont bientôt plus des voix et la parole s’oublie, s’étouffe dans …
Après "T3M" qui, autour de la mémoire traumatique et de la réparation, proposait une poésie puissante de reconstruction (bw.heraut.eu/user/Ameimse/review/29920/s/t3m-science-fiction-poesie#anchor-29920), "PERIOD2." est un nouveau texte de "poésie science-fictionnelle" (pour reprendre le qualificatif de l'autrice) d'Héloïse Brézillon. Il y est question d'effondrements du vivant et de tenter de "changer de période" en retissant les liens abîmés avec les "autres-qu'humains". Une lecture qui remue et qui touche. Le livre est accompagné d'une postface qui permet à l'autrice de préciser d'où (et avec qui) elle parle, notamment en mettant en lumière l'inspiration et le souffle puisés dans "Vivre avec le trouble" de Donna Haraway - dont les références sont très perceptibles. Elle poursuit donc dans son registre particulier entre poésie & science-fiction, pour explorer et tenter d'envisager le dépassement de la "crise de la sensibilité" identifiée par Baptiste Morizot.
Après "T3M" qui, autour de la mémoire traumatique et de la réparation, proposait une poésie puissante de reconstruction (bw.heraut.eu/user/Ameimse/review/29920/s/t3m-science-fiction-poesie#anchor-29920), "PERIOD2." est un nouveau texte de "poésie science-fictionnelle" (pour reprendre le qualificatif de l'autrice) d'Héloïse Brézillon. Il y est question d'effondrements du vivant et de tenter de "changer de période" en retissant les liens abîmés avec les "autres-qu'humains". Une lecture qui remue et qui touche. Le livre est accompagné d'une postface qui permet à l'autrice de préciser d'où (et avec qui) elle parle, notamment en mettant en lumière l'inspiration et le souffle puisés dans "Vivre avec le trouble" de Donna Haraway - dont les références sont très perceptibles. Elle poursuit donc dans son registre particulier entre poésie & science-fiction, pour explorer et tenter d'envisager le dépassement de la "crise de la sensibilité" identifiée par Baptiste Morizot.

Zelu est nigériano-américaine. Zelu est paraplégique. Zelu est auteure. Mais Zelu n’est pas reconnue : ni par sa famille nombreuse …
Premee Mohamed a l'art de glisser ses lecteurices dans des univers vraiment différents, en adoptant des styles d'écriture (bien rendus par la traduction de Marie Surgers) dans lesquels la puissance évocatrice de sa plume et sa capacité à faire ressortir en peu de mots l'essentiel ne font jamais défaut.
Dans "Et que désirez-vous ce soir ?", le cadre principal est une maison close, avec en arrière-plan, à peine esquissé, un monde digne d'une dystopie caractérisé par quelques détails glaçants. On y suit une narratrice, courtisane, témoin de la résurrection, puis de la croisade vengeresse (et participante à l'occasion), d'une amie également courtisane. C'est un texte qui se concentre sur les ressentis, rempli d'émotions autour desquelles se déploie l'ensemble de la narration, et donc l'intrigue et les affrontements qui vont avoir lieu. L'autrice fait le choix de laisser une place centrale à tous les états d'âme successifs d'une narratrice, tiraillée …
Premee Mohamed a l'art de glisser ses lecteurices dans des univers vraiment différents, en adoptant des styles d'écriture (bien rendus par la traduction de Marie Surgers) dans lesquels la puissance évocatrice de sa plume et sa capacité à faire ressortir en peu de mots l'essentiel ne font jamais défaut.
Dans "Et que désirez-vous ce soir ?", le cadre principal est une maison close, avec en arrière-plan, à peine esquissé, un monde digne d'une dystopie caractérisé par quelques détails glaçants. On y suit une narratrice, courtisane, témoin de la résurrection, puis de la croisade vengeresse (et participante à l'occasion), d'une amie également courtisane. C'est un texte qui se concentre sur les ressentis, rempli d'émotions autour desquelles se déploie l'ensemble de la narration, et donc l'intrigue et les affrontements qui vont avoir lieu. L'autrice fait le choix de laisser une place centrale à tous les états d'âme successifs d'une narratrice, tiraillée par les doutes, la détresse, les peurs, mais aussi habitée par une rage contre le monde profondément inégalitaire, injuste et impitoyable dans lequel elle tente de survivre. C'est fort et intense. Avec des fulgurances qui marquent.
Une novella qui a des allures de fable et m'a, une nouvelle fois chez Premee Mohamed, autant interpellée que touchée.