En 1969, Peter March, un père de famille, bon marin et amateur de défis, se …
Perdre pied en solitaire
5 étoiles
La course à la voile, s'il met #IsabelleAutissier dans son élément, n'est qu'un (magnifique) cadre pour accompagner cet homme, Peter March (inspiré de #DonaldCrowhurst) qui perd pied face au monde. Il ne connaîtra en fait qu'un seul épisode de gros temps, alors que la course est déjà abandonnée depuis longtemps et qu'il "fait semblant" seulement.
La #solitude du #GoldenGlobe, on peut l'éprouver à terre. March (comme le mois du printemps ou l'ordre d'avancer ?) fait face à ses limites, ses peurs, à l'exigence du monde. Il perd pied.
Le regard de sa fille, qui à quinze ans de distance a gardé sa douleur mais aussi sa tendresse, permet d'appréhender sa chute sans jugement, avec humanité.
Cette nouvelle édition de l’Histoire de ma vie est entièrement basée sur le manuscrit acquis …
Bien sûr, le nom de #Casanova est proverbialement associé avec une #sexualité débridée. Ce qui n'est absolument pas usurpé. Les histoires s'accumulent à un rythme effréné, contées en général avec brio et une sincérité au moins apparente des sentiments qui fait qu'elles touchent juste.
Malgré cela, quelques réserves. D'abord, il est évident que sous ses dehors de sincérité et d'une absence d'arrogance, Casanova sait tourne ses récits pour se donner un beau rôle tout en admettant diverses escroqueries et trahisons. Sa philosophie est qu'on ne ment pas si l'on est sincère au moment où l'on donne sa parole... et que cela n'engage en rien pour l'avenir. Promettre un amour éternel et exclusif qui ne sera ni l'un ni l'autre n'est donc pas seulement un lieu commun, c'est presque une vertu sous sa plume, puisque c'est fait du fond du cœur. Les abandons quand on n'aime plus sont pardonnables, mais il …
Bien sûr, le nom de #Casanova est proverbialement associé avec une #sexualité débridée. Ce qui n'est absolument pas usurpé. Les histoires s'accumulent à un rythme effréné, contées en général avec brio et une sincérité au moins apparente des sentiments qui fait qu'elles touchent juste.
Malgré cela, quelques réserves. D'abord, il est évident que sous ses dehors de sincérité et d'une absence d'arrogance, Casanova sait tourne ses récits pour se donner un beau rôle tout en admettant diverses escroqueries et trahisons. Sa philosophie est qu'on ne ment pas si l'on est sincère au moment où l'on donne sa parole... et que cela n'engage en rien pour l'avenir. Promettre un amour éternel et exclusif qui ne sera ni l'un ni l'autre n'est donc pas seulement un lieu commun, c'est presque une vertu sous sa plume, puisque c'est fait du fond du cœur. Les abandons quand on n'aime plus sont pardonnables, mais il parvient aussi à justifier ceux quand on aime encore — et qui surviennent par peur de s'enfermer — soit comme étant une fatalité aux causes extérieures (le couvent surveille désormais trop C.C. puis M.M.,...), soit comme étant un bien pour elles, puisque des hommes certes moins flamboyants que Casanova mais aimants et responsables les épousent. On manque alors singulièrement des opinions de l'autre partie pour vraiment en juger.
De plus, il y a tout de même au moins trois de ces dizaines d'histoires qui tombent dans la catégorie du #viol pur et simple. Que ce soit par contrainte implicite (un viol collectif duquel Casanova participe sans être meneur d'après lui, mais dont il fait l'apologie), par tromperie (une très jeune fille grâce à l'ascendant obtenu sur elle et son père) ou par la force (tentative de viol d'une blanchisseuse dans l'obscurité d'un escalier).
A ces trois occasions j'ai hésité à interrompre ma lecture. Ce qui m'a fait poursuivre est la relative rareté de ces épisodes, l'#humanisme malgré tout assez constant dont fait montre Casanova, et l'intérêt de la découverte de l'#Europe du #XVIIIe siècle vue de l'intérieur. Ces épisodes disparaissent heureusement dans les 2e et 3e volume.
Cette nouvelle édition de l’Histoire de ma vie est entièrement basée sur le manuscrit acquis …
Le premier contact a été surprenant, avec cette autobiographie écrite par #Casanova lui même il y a plus de 200 ans.
Casanova s'adresse à nous sur un ton de conversation, où l'étrangeté de la langue tient plus de ses italianismes (trés plaisants) qu'aux siècles qui nous séparent. C'est donc un étranger installé au coin de la cheminée qui raconte sa vie, avec humour et une bonne capacité d'autodérision. Son égo n'est certes pas petit, mais il s'intéresse authentiquement à ceux (et surtout celles) qu'il rencontre.
Et traverser avec lui toute l'#Europe (jusqu'à #Constantinople et #Moscou en passant par #Londres) avec un regard acéré sur les sociétés et les puissants est bien sûr passionnant.
Virginia Woolf’s novel chronicles a day in the life of Clarissa Dalloway, a politician’s wife …
Mrs Dalloway
4 étoiles
Le livre se déroule le long d’une journée du mois de juin 1923, à Londres. Il est centré sur le personnage de Mrs Dalloway, une bourgeoise londonienne qui organise une soirée chez elle, avec toute une galerie de personnages qui gravitent autour d’elle.
Ce qui retient surtout l’attention, c’est le style : l’essentiel du livre se passe dans la tête des personnages. Le récit suit le fil de leurs pensées, et nous révèle leur vie intérieure et leur vision des choses. L’écriture laisse une impression de fluidité : le texte coule sans discontinuer d’une idée à une autre au gré des pensées des personnages, (d’ailleurs il n’y a pas de chapitres : les 300 pages s’enchaînent quasiment en continu), et parfois il saute d’un personnage à un autre, lesquels se jugent les uns les autres, ou bien partagent une même expérience mais l’appréhendent différemment.
C’est vraiment une écriture de l’intériorité. …
Le livre se déroule le long d’une journée du mois de juin 1923, à Londres. Il est centré sur le personnage de Mrs Dalloway, une bourgeoise londonienne qui organise une soirée chez elle, avec toute une galerie de personnages qui gravitent autour d’elle.
Ce qui retient surtout l’attention, c’est le style : l’essentiel du livre se passe dans la tête des personnages. Le récit suit le fil de leurs pensées, et nous révèle leur vie intérieure et leur vision des choses. L’écriture laisse une impression de fluidité : le texte coule sans discontinuer d’une idée à une autre au gré des pensées des personnages, (d’ailleurs il n’y a pas de chapitres : les 300 pages s’enchaînent quasiment en continu), et parfois il saute d’un personnage à un autre, lesquels se jugent les uns les autres, ou bien partagent une même expérience mais l’appréhendent différemment.
C’est vraiment une écriture de l’intériorité. Virginia Woolf arrive très bien à retranscrire la vie intérieure de ses personnages.
Parmi les thèmes abordés, outre la description de la bourgeoisie londonienne des années 1920, de ses mondanités, et du Londres de l’époque (le plan de la ville en annexe n’est pas de trop), on trouve des questions existentielles assez universelles : les personnages sont confrontés à leur passé, au sens de leur vie, à leurs rapports aux autres, mais aussi à des sujets inattendus : les inégalités sociales, l’homosexualité féminine, la folie, le suicide...
Parfois, le texte a provoqué chez moi une sensation de vertige étrange. Il se déroule en 1923, il y a presque exactement un siècle, et la moyenne d’âge des personnages doit tourner autour de 50 ans. Lorsque l’un d’eux évoque son adolescence dans les années 90, ça me renvoie à ma propre adolescence dans les années 90… avant de réaliser qu’il parle bien sûr des années 1890. Ou à un autre moment, ils mentionnent un peuple massacré au moyen-orient, on pense instantanément aux palestiniens, sauf qu’ils parlent... des arméniens. Comme si 1923 et 2023 s’interpénétraient le temps d’un instant...
On a ainsi une vieille espagnole qui s'apprête à participer à la transmission de documents au KGB par loyauté envers un couple décédé qui s'avère n'avoir aucun lien familial avec elle, tandis qu'un universitaire vaguement obsédé (dont #Semprun nous dit explicitement qu'il n'a rien à voir avec l'intrigue) est fasciné par un petit pan de mur (qu'on n'est pas sûr de voir dans un tableau de #Vermeer) parce qu'il est central dans le roman de #Proust qu'il n'a pas lu.
Le tout ancré dans les #1960s prudes et délurées, où les victimes de #Staline sont les plus fervents #communistes et les plus loyaux agents du #KGB.
Sous son activité de directeur adjoint d'une société espagnole de commerce, Ramón Mercader cache sa …
Les espions ne sont pas si froids
4 étoiles
Un roman d'espionnage déstructuré (et même carrément en petit morceaux, que ce soit dans son déroulé tortueux, dans ses personnages qui ne savent pas vraiment pourquoi ils sont là ou dans l'écriture ; avec notamment ces parenthèses où je m'adresse au lecteur sans crier gare) mais où les personnages, qui pourtant n'ont pour la plupart rien d'aimable, sont tous dotés d'une humanité ténue qui suscite une véritable empathie.
Sous son activité de directeur adjoint d'une société espagnole de commerce, Ramón Mercader cache sa …
Un roman d' #espionnage déstructuré (et même carrément en petit morceaux, que ce soit dans son déroulé tortueux, dans ses personnages qui ne savent pas vraiment pourquoi ils sont là ou dans l'écriture ; avec notamment ces parenthèses où je m'adresse au lecteur sans crier gare) mais où les personnages, qui pourtant n'ont pour la plupart rien d'aimable, sont tous dotés d'une humanité ténue qui suscite une véritable empathie.
Le livre d' #UrsulaParrott n'est pas #féministe militant, c'est le roman d'une #femme qui se trouve devenir libre bien contre son gré et vit cette liberté avec un grand pragmatisme — sans pour autant que cela amenuise son humanité et la possibilité de s'émouvoir et d'aimer.
Un genre de contradiction que peut-être seule l'Amérique des années folles était capable de faire vivre.
Le livre d' #UrsulaParrott n'est pas #féministe militant, c'est le roman d'une #femme qui se trouve devenir libre bien contre son gré et vit cette liberté avec un grand pragmatisme — sans pour autant que cela amenuise son humanité et la possibilité de s'émouvoir et d'aimer.
Un chapitre toutefois, le pénultième et le plus long, nous replonge dans une littérature du dilemme moral et amoureux du XIXe siècle. Mais tout le restant du roman répond lui beaucoup plus à une vision du monde pertinente vue du XXIe siècle, avec en plus ce brillant et cette excitation qu'apportait la nouveauté.
Un lieu à soi rassemble une série de conférences sur le thème de la fiction …
Un magnifique petit bout de littérature
5 étoiles
De quoi nous parle ce petit bouquin ? De femmes et de fiction. Plus précisément, des femmes romancière et poétesses. Ou plutôt de leur absence. « Beaucoup de livres écrits par des hommes parlent de femmes, mais il y a très peu de femmes qui parlent d'hommes ».
On est pas du tout dans une conférence ou un écrit académique (même si l'autrice connaît très bien ses classiques). Woolf nous déroule le fil de ses pensées sur les deux jours précédant la conférence. Il ne s'y passe factuellement pas grand chose: elle marche sur une pelouse, se voit refuser l'accès à la bibliothèque, mange bien le midi et mal le soir. Mais ce qui importe, c'est ce que ces événements suscitent tout un tas de pensées qui éclosent de manière un peu foutraque, comme les bulles d'une eau en train de frémir.
La thèse qu'elle défend parmi tant d'autres est …
De quoi nous parle ce petit bouquin ? De femmes et de fiction. Plus précisément, des femmes romancière et poétesses. Ou plutôt de leur absence. « Beaucoup de livres écrits par des hommes parlent de femmes, mais il y a très peu de femmes qui parlent d'hommes ».
On est pas du tout dans une conférence ou un écrit académique (même si l'autrice connaît très bien ses classiques). Woolf nous déroule le fil de ses pensées sur les deux jours précédant la conférence. Il ne s'y passe factuellement pas grand chose: elle marche sur une pelouse, se voit refuser l'accès à la bibliothèque, mange bien le midi et mal le soir. Mais ce qui importe, c'est ce que ces événements suscitent tout un tas de pensées qui éclosent de manière un peu foutraque, comme les bulles d'une eau en train de frémir.
La thèse qu'elle défend parmi tant d'autres est très joliment amenée. Très simplement, écrire demande du temps et un espace où réfléchir et travailler, temps et lieu que les femmes n'avaient tout simplement pas la possibilité d'avoir à cause du patriarcat. Il y a plein d'autres petites choses à picorer: j'y ai appris que le test de Bechdel est en fait inspiré de ce livre !
Le livre est agréable à lire de bout en bout, je ne l'ai pas lâché en trois jours. C'est plutôt bon signe.