Anthony a commencé la lecture de Le Silence de la mer par Jean Bruller
Le Silence de la mer de Jean Bruller
Sous l'Occupation, une famille française est contrainte de loger Werner von Ebrennac, un officier allemand : c'est un homme de …
Rassure-toi, tu ne vas pas mourir de lire.
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Sous l'Occupation, une famille française est contrainte de loger Werner von Ebrennac, un officier allemand : c'est un homme de …
La petite est morte. Ça, point de doute, la narratrice l'annonce dès le début. Le ton est donné. Nous sommes tout ouïe derrière la vitre sans tain, à l'écoute du témoignage de celle, invisible, qui assiste à tout, de celle, la « bonne », qui connaît peut-être mieux la famille que ses propres membres. Parce que sa mère l'a prévenue, elle a tenté de l'en disculper : tu l'aimeras, parce que tu es humaine, c'est comme ça, mais jamais tu ne feras partie de cette famille. Un monologue bouleversant d'une de ces femmes à qui l'on ne donne jamais la parole, que seul l'exceptionnel, ici, vient interroger. Alors elle parle, elle parle et profite de l'occasion pour digresser, pour remonter au début, aux débuts ; elle dresse peu à peu le tableau du drame, du bruit, du silence, d'un pays violent. Elle parle, et c'est évidemment poignant.
Un tissu est capable de garder de très nombreux secrets, y avez-vous déjà songé ? Les genoux usés parce qu’on est souvent tombé par terre, l’entrejambe poli par le frottement de cuisses trop fortes, les coudes marqués par des heures et des heures d’ennui. Les tissus ne mentent pas, ne font pas semblant : il y a un endroit où ils s’usent, se déchirent, se tachent. Il y a beaucoup de façons de parler. La voix est seulement la plus simple.
— Propre de Alia Trabucco Zerán (74%)
Je me tenais là, sans savoir quoi faire. La petite criait, grognait, entre la peur et la douleur. À cet instant, Monsieur a levé les yeux et m’a cherchée du regard. Un regard empli de rancœur. Parce que la bonne avait ressenti de la pitié pour sa famille.
— Propre de Alia Trabucco Zerán (67%)
« Je m’appelle Estela, vous m’entendez ? Es-te-la Gar-cí-a. »
La fillette meurt. Voici le fait par lequel Estela commence …
Encore une année de passée, j’ai pensé. Ils se sont étreints et embrassés. Ils se sont souhaité succès, amour, argent, santé. Ils ont désiré du travail et de l’abondance. Ils se sont tapoté le dos et les joues. Ils étaient émus, je les ai vus. Sur le seuil de la cuisine, je les regardais et, malgré moi, sans pouvoir m’en empêcher, je souriais. Je souriais parce que nous sommes ainsi faits, les humains. Nous sourions et bâillons quand les autres sourient et bâillent.
— Propre de Alia Trabucco Zerán (41%)
Le vin est si cher à Paris, par les impôts que l’on y met, qu’il semble qu’on ait entrepris d’y faire exécuter les precepts du divin Alcoran, qui défend d’en boire. Lorsque je pense aux funestes effets de cette liqueur, je ne puis m’empêcher de la regarder comme le présent le plus redoutable que la nature ait fait aux hommes. Si quelque chose a flétri la vie et la réputation de nos monarques, ç’a été leur intempérance ; c’est la source la plus empoisonnée de leurs injustices et de leurs cruautés.
— Lettres Persanes de Montesquieu (16%)
J'ai vu le film de Melville il y a bien longtemps mais c'est en écoutant une émission du Souffle de la Pensée (avec Michelle Perrot) que m'est venue l'idée de lire ce livre : www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-souffle-de-la-pensee/le-souffle-de-la-pensee-emission-du-vendredi-13-decembre-2024-3731084
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Ma voix vous dérange, je me trompe ? Parlons de cela, de ma voix. Vous vous attendiez à autre chose, n’est-ce pas ? Une voix plus docile et redevable. Vous enregistrez mes paroles ? Vous sauvegardez mes digressions ? Qu’y a-t-il encore ? La domestique ne peut pas non plus utiliser le mot « digression » ? Et si vous me prêtiez la liste de vos mots et des miens ?
— Propre de Alia Trabucco Zerán (28%)
Plus tard j’ai réalisé que dans cette maison tout était urgent, même si je n’ai jamais compris leur hâte, une telle hâte. Si on se dépêche, on gaspille son temps, c’est ce que disait ma mère quand j’étais en retard pour l’école et que je coupais à travers le jardin. On ne peut jamais gagner contre le temps, me prévenait-elle. Cette course est jouée dès le jour de notre naissance.
— Propre de Alia Trabucco Zerán (4%)
Je discutais de ce livre l'autre jour avec Y. mon libraire préféré, et il me disait comment il tenait à éviter ces best-sellers mondiaux, ou plutôt à en retarder la fréquentation. Je n'ai pu m'empêcher de mentionner Les misérables, et il y a des similitudes entre ces deux romans, au delà des différences formelles évidentes. Eco ne peut s'empêcher de faire disserter ses personnages, alors que Hugo se garde pour lui-même ces splendides digressions sur l'argot ou l'architecture parisienne. Dans les deux cas, on connaît déjà l'histoire, ou on croit la connaître, et le cinéma nous y aide un peu.
Il n'empêche qu'un jour, le livre se met entre vos mains et exige d'être lu. Alors les cavaliers de l'Apocalypse démarrent leur terrifiante cavalcade, les flammes de l'orgueil dévorent la librairie pendant qu'un moine s'en va, emportant avec lui le visage d'une femme dont il n'aura pas connu le …
Je discutais de ce livre l'autre jour avec Y. mon libraire préféré, et il me disait comment il tenait à éviter ces best-sellers mondiaux, ou plutôt à en retarder la fréquentation. Je n'ai pu m'empêcher de mentionner Les misérables, et il y a des similitudes entre ces deux romans, au delà des différences formelles évidentes. Eco ne peut s'empêcher de faire disserter ses personnages, alors que Hugo se garde pour lui-même ces splendides digressions sur l'argot ou l'architecture parisienne. Dans les deux cas, on connaît déjà l'histoire, ou on croit la connaître, et le cinéma nous y aide un peu.
Il n'empêche qu'un jour, le livre se met entre vos mains et exige d'être lu. Alors les cavaliers de l'Apocalypse démarrent leur terrifiante cavalcade, les flammes de l'orgueil dévorent la librairie pendant qu'un moine s'en va, emportant avec lui le visage d'une femme dont il n'aura pas connu le nom.
« Je m’appelle Estela, vous m’entendez ? Es-te-la Gar-cí-a. »
La fillette meurt. Voici le fait par lequel Estela commence …
Tu ne le croirais pas, peut-être ; depuis un mois que je suis ici, je n’y ai encore vu marcher personne. Il n’y a point de gens au monde qui tirent mieux parti de leur machine que les Français : ils courent ; ils volent : les voitures lentes d’Asie, le pas réglé de nos chameaux, les feraient tomber en syncope.
— Lettres Persanes de Montesquieu (14%)
Dans Tarentule, nous naviguons achronologiquement dans des souvenirs, reconstruisons petit à petit une Histoire, souvent confrontés à l'incertitude quant à savoir si l'événement narré a été vécu ou rêvé. Le nom du narrateur est identique à celui de l'auteur, ce qui floute davantage la nature même du récit. Il est question de judaïsme. Imposé – violemment – à Eduardo pendant son enfance, il semble que, peu à peu, ce dernier parvienne à en dessiner ses propres contours. Les petits-enfants de celles et ceux qui ont vécu l'impensable, ou qui ne sont pas revenus, se cherchent et tâtonnent différemment dans leurs cheminements mémoriels : certains par l'écrit, d'autres dans la transmission par le rite – la tradition –, et d'autres encore dans la brutalité. Tarentule est un roman assez court qui explore et ouvre des portes sans les travers de l'explication.
Après avoir vidé son verre comme si cette dernière gorgée n’était pas de rhum mais d’essence, Samuel m’a craché avec ardeur : Tu ne sentiras pas la douleur si tu te contentes de lire des choses sur elle dans un de tes livres, puis il a abattu sa paume sur la table et j’ai imaginé un juge et son maillet prononçant ma sentence.
— Tarentule de Eduardo Halfon (85%)