"L'enfant à haut potentiel est un enfant, comme les autres" est un ouvrage qui est extrêmement bien décrit par son titre, tout en ne se laissant pleinement saisir que très progressivement. L'autrice, ou l'auteure, car elle semble préférer cette féminisation, le consacre à l'école qu'elle a fondée dans le 14ᵉ arrondissement parisien, pour accueillir les enfants à haut potentiel, tout en étant justement très prudente sur l'utilisation de cette appellation.
Elle y décrit l'approche originale de ces enfants, à travers trois parties à la lumière de l'œuvre de Victor Hugo. La première, "Cosette, l'alouette qui ne chantait jamais", les approche via leur innocence, la confiance et la joie qu'ils doivent pouvoir développer dans le cadre de leurs relations avec les adultes. La deuxième, "Gavroche, la petite grande âme qui voulait s'envoler", en prend le contrepied pour aborder leur créativité, qui va de pair avec une tendance à l'insurrection pour conquérir une indispensable liberté. La dernière, "Gwynplaine, l'enfant qui sourit" est peut-être la plus philosophique en abordant les questions d'identité et de la quête du sens de la vie, pour finir par une réflexion sur la question de la sensibilité dans la pédagogie.
Comme je m'y attendais, j'ai eu un peu de mal à entrer dans la dialectique de ce livre, qui m'a semblé n'offrir comme seule issue à tous les enfants à haut potentiel l'inscription dans l'école parisienne Georges Gusdorf, du fait de l'inadaptation rédhibitoire de l'école de la République à leur profil cognitif. Toutefois, il faut bien reconnaître que l'analyse qui est faite des pratiques de notre école républicaine est loin d'être erronée, et qu'il lui est effectivement très difficile de s'adapter aux profils individuels.
Néanmoins, et c'est probablement là la force de ce livre, la réflexion pédagogique menée s'étend, selon moi, bien au-delà des "enfants et adolescents précoces", dont il est d'ailleurs montré que la définition est intrinsèquement imprécise, laissant les frontières floues. C'est à ce moment que le titre révèle toute sa force : "L'enfant à haut potentiel est un enfant, comme les autres". Cette affirmation peut se lire dans les deux sens : ce qui est vrai pour les enfants l'est pour tous les enfants, qu'ils soient à haut potentiel ou non. L'adaptation pédagogique individuelle qui est prônée ici pour les hauts potentiels n'est pas, toujours selon moi, à réserver à cette population : elle serait salutaire pour tous, posant par là la question des moyens alloués à l'école (publique, bien sûr).
"Si vous trouvez que l'éducation coûte cher, essayez l'ignorance." (Robert Orben)